Nuages d'été
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Après "le repas" (1951) et "Nuages flottants" (1955), c'est le troisième film de Mikio Naruse, réalisé en 1958, que je découvre. Les deux premiers sont en noir et blanc et traduisent un univers familial intimiste sur la recherche du bonheur qu'on prend ("le repas") ou qu'on va chercher ("nuages flottants").
"Nuages d'été" est en couleur. Si j'ai bien compris, c'est la première fois que Naruse se lance dans cette technique. Certains le lui auraient reproché car trahissant son style. Personnellement, je dirais, sans vraiment connaître le problème, que Naruse a donné une autre dimension à son film en filmant la campagne japonaise en été avec un grand lyrisme. Quoi de plus beau que ces rizières et ces champs de blé prêts à être moissonnés, que cette campagne très belle mais que tous les jeunes veulent quitter.
On retombe sur un sujet qui, finalement, est assez universel de nos jours. L'âpreté de la vie à la campagne, le faible revenu d'une exploitation, la division des terres entre les héritiers, l'attirance de la ville et de ses salaires sont de nature à décourager les jeunes.
Le début du film tient presque du documentaire car une jeune agricultrice et veuve, Yaé, contribue à une enquête menée par un journaliste évaluant l'impact de la réforme agraire et des transmissions et répartitions des patrimoines. On voit le début de la mécanisation de l'agriculture sur les lopins de terre et ses difficultés ou réticences devant le progrès. On découvre aussi, par exemple, le poids des traditions dans la conduite des fermes et en particulier la dure autorité des belles-mères sur les brus qui n'ont aucun droit sinon celui de se taire.
Yaé qui est la mère d'un jeune garçon avoue "n'être rien encore tant que son fils ne sera pas marié et ne deviendra alors qu'une belle-mère détestée et gênante"
Honnêtement, je souris car en France, c'est la même chose et j'ai connu certaines fermes où l'épouse du "patron" menait la vie dure aux brus qui n'étaient que de "la pièce rapportée" (surtout si elles n'amenaient pas trop de biens). Je pense même qu'on doit, encore une fois, pouvoir généraliser à tous les pays …
Dans ce film, j'ai admiré le beau personnage de Yaé, joué par une actrice pleine de talents, Chikage Awashima. Je ne connais bien sûr pas mais je vois sur Wiki qu'elle a joué dans plus de 150 films …
Elle est la sœur du patriarche de la famille et d'un autre, personnage un peu effacé occupé à confectionner des tatamis.
C'est la raison face au frère colérique et avare, soucieux des apparences. Elle arrange, à son corps défendant, les affaires de ses neveux et nièces qui veulent laisser le travail de la terre et trouver le bonheur à la ville. Même si son attachement à la terre est viscéral. Elle vit une belle histoire d'amour avec le jeune journaliste qu'elle ne parviendra pas à concrétiser.
Il y a des moments cocasses quand le patriarche engueule et insulte son frère parce qu'il a laissé sa fille se faire engrosser (à la ville), pour découvrir que l'auteur du "délit" est son propre fils (destiné à une autre femme).
Ce film est un beau et intéressant document sociologique sur la paysannerie et ses mutations au Japon dans l'après-guerre.
Alors que les deux premiers opus "le repas" et "nuages flottants" concernaient essentiellement la recherche du bonheur, "nuages d'été" est beaucoup plus dans une tonalité un peu pessimiste de la résignation dans la continuation du travail de la terre prioritairement sur le bonheur.
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le 1 sept. 2023
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