Avec Ixcanul, Jayro Bustamante a placé le Guatemala sur la carte du monde cinématographique. Nuestras madres, Caméra d'Or au Festival de Cannes 2019, est signé d'un documentariste qui a été le monteur de Bustamante. Cesar Diaz partage avec ce dernier l'envie nécessaire de parler des minorités de son pays (les mayas), notamment à travers le prisme de la guerre civile qui a décimé le pays pendant des années. En ce sens, Nuestras Madres n'est pas que le film de Cesar Diaz, il est aussi celui du peuple guatémaltèque dans son ensemble, soumis à la torture et victime des exactions de la dictature. Son côté didactique, le film le revendique et nourrit une trame simple et poignante, sur une durée limitée de 76 minutes qui exclut toute trace de "gras" dans son récit. L'histoire est celle des veuves du Guatemala, en quête de justice, mais surtout d'une sépulture décente pour leurs morts entassés dans des fosses communes. Et c'est à travers le regard d'un homme de la jeune génération, impliqué dans son travail d'anthropologue judiciaire pour des raisons d'abord intimes que se construit le film, sans s'attarder outre mesure sur la vie personnelle de ce personnage principal. Sa relation vibrante avec sa mère, et plus largement avec toutes les mères endeuillées, offre les moments les plus touchants du film sans que celui-ci ne perde de sa dignité ni de sa délicatesse. La mise en scène, apaisée, met toujours la caméra à la bonne distance et les qualités de monteur de Diaz se révèlent éclatantes. Le twist final et familial, incongru et sans soute inutile (cela se discute, néanmoins) ne parvient pas à gâcher l'excellente impression laissée par Nuestras Madres qu'on aurait cependant aimé voir se prolonger d'au moins une demi-heure de plus.