Ishak vit seul dans la province d’Anatolie et gagne sa vie en jouant du luth dans une boîte de nuit. Un jour, il doit se rendre au chevet de sa mère dans son village natal qu’il a dû quitter subitement sept ans auparavant. De retour dans son village Ishak est alors confronté à l’hostilité de tous ainsi qu’aux tourments de son propre passé...
Nuit noire en Anatolie est un thriller dramatique turc de Özcan Alper, sorti en 2024
Ishak rentre dans son village natal au chevet de sa mère gravement malade. Après 7 ans d'absence , il n'a jamais oublié qu'il fut témoin de la disparition d'un jeune garde forestier, Ali, lynché par les villageois, la nuit tombée. Blond, citadin et ancien étudiant, Ali avait tout pour déplaire aux villageois hirsutes mal rasés, mal habillés et dépourvus d'éducation, bien plus soucieux de leur honneur que de la vie d'autrui. Ishak et Ali étaient amis, tellement amis que cela faisait ironiser bêtement ces derniers, vaguement homophobes, qui préfèrent les coutumes ancestrales qui les arrangent aux lois qui doivent s'appliquer sur l'ensemble du territoire turc. Ali était obsédé par un félin en voie de disparition qu'il croyait toujours présent dans la région, le caracal. Fraîchement nommé comme garde forestier, Ali se fait rapidement des ennemis en confisquant les pièges posés par les braconniers et en embarquant au poste les récalcitrants qui le menacent. Il n'est pas soutenu par sa hiérarchie qui préfère acheter la paix sociale. Enseignant à ses heures perdues les mathématiques à Sultan (Pinar Deniz), une jeune et jolie villageoise, il s'arrête au milieu du guet après l'avoir embrassé sur la bouche à la fin d'un cours, elle qui attendait tellement plus....ce qui la conduit à sous entendre qu'il est homosexuel. Les rumeurs "enflent" dans le village où l'on reproche contradictoirement au jeune homme d'avoir abusé de son élève et d'être homosexuel . De plus en plus seul, retiré dans un refuge de montagne, il est victime d'une expédition punitive durant laquelle Ishak, son ami, assiste, impuissant, à sa mise à mort par une dizaine d'individus armés de gourdins. Le corps d'Ali disparait.
Seul contre tous....
Sept ans après, Ishak, revenu au village enquête sur la disparition de son ami dont il veut retrouver la dépouille, sans doute jeté dans une des nombreuses cavités qui peuplent la campagne anatolienne. Ishak se retrouve seul après la mort de sa mère et le départ de Sirma, la soeur d'Ali (Sibel Kekilli). En quête du corps (Sans cadavre, pas de crime...), il arpente inlassablement les vallons en moto et devient lui aussi la cible de la vindicte et des menaces des mêmes villageois imbéciles, mus par un instinct grégaire, toujours aussi violents, cruels et bourrés de préjugés. Il décide de rester coûte que coûte, les menaces se précisent. Son chien, Clown, est égorgé....
Comme dans Burning days ou L'étrangère, Nuit noire en Anatolie dresse un portait désillusionné de la Turquie des campagnes contemporaine où règne la coutume dictée par le chef du village, l'intolérance et la loi du silence plutôt que le droit, le cocktail débouchant inévitablement sur des drames. Toutes les exactions sont permises par les autorités. Nuit noire en Anatolie fait le constat d'une société moyenâgeuse figée, en mal d'avenir et dépourvue d'ouverture et de tolérance. S'appuyant sur bon nombre de scènes d'affrontements et de tensions, le réalisateur dresse autant de tableaux inquiétants d'un thriller qui se fait de plus en plus oppressant qu'il n'approche de son terme. Nul doute que, comme dans les sociétés tribales afghane ou pakistanaise des campagnes, l'érosion de la classe moyenne (Qui migre en Allemagne), la montée de l'islamisation des masses (Comme en Iran) encouragée par Erdogan et le crétinisme quasiment consanguin de nombre de ses habitants, aussi peu évolués qu'ils ne sont agressifs et conscients de leur impunité, ne fasse craindre le pire pour l'avenir, surtout pour ceux qui "sortent des sentiers battus".
J'ai traversé la région en 1991, on dirait qu'effectivement, rien n'a vraiment changé depuis dans les villages anatoliens....
Trailer
Ma note: 7/10