Odyssée burlesque
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Mississippi,années 30.Trois prisonniers s'évadent d'un pénitencier et entament une longue cavale durant laquelle ils vont faire nombre de rencontres insolites et extravagantes qui les mèneront de galère en galère avant que d'atteindre leur but final.On pense ce qu'on veut des frères Coen mais force est de reconnaître qu'ils font oeuvre d'originalité dans l'univers généralement très formaté du cinéma américain contemporain.Et là ils n'y sont pas allé avec le dos de la cuiller avec cette très libre adaptation de "L'Odyssée" d'Homère projetée dans le Sud de l'Amérique de la Grande Dépression.Joel réalise,Ethan produit,et les deux ont écrit le scénario de ce road movie barré à bloc en forme de comédie musicale convoquant tous les sons de la vieille ruralité sudiste,du country au gospel et du bluegrass au folk en passant par le blues,sous la supervision du grand T-Bone Burnett.La production est signée de l'excellente Working Title de Bevan et Fellner,et la photo de l'immense Roger Deakins est d'une admirable texture chaude et lumineuse.Les Coen nous convient à une balade décontractée au rythme vif à travers les petites routes paumées,les bois et les champs du Sud profond,mêlant adroitement les codes du road movie campagnard au symbolisme antique,l'Odyssée se prêtant au fond parfaitement à ce traitement.On retrouve donc en route quelques éléments du récit d'Homère remis au goût du jour.Ulysse,c'est le leader du groupe de fuyards,d'ailleurs prénommé Ulysses,et la Pénélope qu'il veut reconquérir s'appelle bien sûr Penny.Elle est naturellement flanquée d'un prétendant sur le point de l'épouser,tandis que les zigs ont en chemin affaire au chant séducteur des sirènes ou à un borgne en guise de cyclope.Les personnages et leurs aventures sont tragiques mais traités de manière comique,les péripéties sont très variées et s'enchaînent harmonieusement et sans répit.Traqués sans relâche par la police,les mecs se heurtent entre deux numéros musicaux euphorisants à un cousin traître et son gamin chaud du flingue,un musicien noir doué,au gangster hystérique Baby Face Nelson,qui a réellement existé et fut un des principaux complices de Dillinger,à un pasteur et ses ouailles procédant à un rite de purification dans une rivière,au patron aveugle d'une radio perdue dans la cambrousse,à un vendeur de bibles violent et même au Ku Klux Klan,tout ça au milieu d'une campagne électorale acharnée opposant le vieux sortant au bout du rouleau à un adversaire "moderne" aux méthodes spectaculaires.Trahis,pris pour cibles,frappés,dupés,volés,ils seront récompensés au bout de leur chemin de croix.La distribution est fantastique,avec en tête de gondole un George Clooney hilarant en Ulysse de pacotille,qui livre un numéro étonnant dans un registre où on ne l'attendait pas.Cultivé et beau parleur,son McGill a le chic pour s'attirer des ennuis mais il ne perd jamais de sa superbe,restant une sorte d'idiot éternellement optimiste.Ses deux compères sont John Turturro,épatant en péquenot râleur,et Tim Blake Nelson,extrêmement touchant en simplet que rien ne surprend.Les seconds rôles sont à l'unisson,Charles Durning campant délicieusement un vieux politicien à la dérive accompagné d'un staff de baltringues comprenant Del Pentecost,qui joue son fils obèse jamais en retard d'une idée stupide,ainsi que J.R. Horne et Brian Reddy en conseillers incapables.Son rival est incarné par Wayne Duvall,gluant à souhait,qui trimballe avec lui le nain Ed Gale et Ray McKinnon en directeur de campagne tête à claques.Surgissent le long de la route John Goodman,brute épaisse malhonnête,Michael Badalucco,braqueur de banques cyclothymique,Frank Collison en bouseux ruiné et Daniel von Bargen en shérif sadique,alors que l'exigeante Penny est interprétée par la charmante Holly Hunter.
Créée
le 10 déc. 2021
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