Œil pour œil
C'est un film de 1957 d'André Cayatte que j'avais vu à la télévision dans les années 70. Fascinant. Au point que j'avais dans la foulée cherché et trouvé le roman de Vahé Katcha dont le scénario est...
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le 9 juil. 2022
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C'est un film de 1957 d'André Cayatte que j'avais vu à la télévision dans les années 70. Fascinant. Au point que j'avais dans la foulée cherché et trouvé le roman de Vahé Katcha dont le scénario est tiré. Cayatte abandonne ici ses sujets de prédilection sur le fonctionnement de la justice et/ou de la société pour aborder quelque chose de plus viscéral, de plus primaire.
On est au Liban dans les années 50 et le docteur Walter, fatigué après une rude journée à l'hôpital, est réveillé en pleine nuit par une femme qui a des douleurs au ventre. Il se contente de la rediriger vers le service de garde de l'hôpital. Elle meurt dans la nuit et son mari, Bortak, fou de douleur, tisse une machiavélique vengeance contre ce docteur qui, selon lui, s'il l'avait voulu, aurait pu sauver sa femme.
Quelque part, c'est bien encore une histoire de justice où un homme estime, unilatéralement, que le docteur a failli dans sa mission et doit payer. Mais, là, l'affaire se traite d'homme à homme. Pas besoin d'un système judiciaire.
Je disais que le film est fascinant car les trois héros sont mutiques.
D'abord le docteur Walter interprété par un Curd Jurgens qui a une vie austère entre son travail très prenant à l'hôpital et son domicile où il vit seul. Sa vie est juste ponctuée par quelques passages au bistrot pour prendre un verre.
Le deuxième personnage est Monsieur Bortak interprété par Folco Lulli. Le personnage est énigmatique et ne dit pas grand-chose non plus. On comprend peu à peu qu'il s'agit du veuf et qui, sans raison apparente, se met en travers de la route du docteur jusqu'à l'attirer dans un piège.
Et puis, surtout, le troisième personnage est le désert montagneux entre Liban et Syrie où Bortak entraine le docteur Walter. Ce troisième personnage est évidemment (très) mutique, lui aussi, ne se livre guère mais génère une angoisse réelle. "N'oubliez pas la soif, docteur, c'est le plus important", ne cesse de rappeler Bortak au docteur …
On pourrait dire que le film est un "road movie". Oui, sauf qu'il n'y a pas de "road" et que le "movie" donne l'impression de tourner en rond sans fin. On pourrait dire que le film est un thriller. Oui, sauf qu'il n'y a pas de suspense haletant ; il n'y a qu'une question lancinante et existentielle que le spectateur solidaire du docteur se pose. Cela finira-t-il un jour ?
La mise en scène de Cayatte est très efficace avec une caméra qui ne cesse de scruter ce désert effroyable avec ces montagnes et ces vallées qui n'en finissent pas. Lorsque la caméra est à hauteur d'homme, on se dit que le cauchemar va bientôt finir, que derrière la prochaine montagne, on va trouver une route mais de temps en temps, la caméra s'élève pour faire découvrir d'autres montagnes et d'autres vallées sans fin. Des scènes sont superbes comme celle du téléphérique artisanal qui fait passer de nulle part à nulle part ! Ou encore la scène inquiétante dans ce village perdu dans la montagne où les gens sont hostiles à la présence de l'étranger. On partage bien l'angoisse du docteur Walter.
A noter dans la BO, la belle chanson "c'est le destin qui commande" de Juliette Greco.
J'ai tant besoin d'espérance
J'ai tant connu de souffrances
Je voudrais savoir enfin quel avenir sera le mien
C'est le secret du destin
Encore un signe que le docteur Walter n'a pas su voir à temps …
Pour finir, je suis bien content d'avoir pu retrouver ce très fascinant film il y a trois ou quatre ans dans la collection "Gaumont" d'autant que la qualité de l'image et du son est très bonne.
Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Adaptations au cinéma de livres que j'ai lus, Films d'André Cayatte et Les meilleurs films de 1957
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le 9 juil. 2022
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