Kevin Costner doit tout aux westerns : son premier rôle d’envergure (Silverado), son statut de star (Danse avec les loups, Wyatt Earp), sa descente aux enfers (Waterworld, un western aqueux et post-apocalypse) et son retour en grâce avec Open range.
L’histoire ne brille pas par son originalité, mais n’est-ce point le propre d’un classique ? Un éleveur itinérant et ses trois cow-boys supportent un orage d’une rare violence dans une nature féérique. Confrontés à l’hostilité de Baxter, le despote local, Mose est tué et le jeune Button laissé pour mort. Boss (Robert Duvall) et Charley (Kevin Costner) s’apprêtent à le défier. A quelques exceptions près, dont la très belle Sue (Annette Bening) et un vieux fou, les villageois fuient.
Si la trame présente des similitudes avec celle d’Unforgiven, c’est à l’admirable Rio Bravo que je le rapprocherai. Plus qu’à une vengeance, nous assistons au délicat passage de la camaraderie masculine à l’amitié, et à la révélation de rapports père fils devant le corps inerte de Button. L’épreuve rapproche les deux hommes mûrs, qui ne se connaissaient guère, malgré dix années de vie errante commune. Le cow-boy parle peu et se révèle encore moins. Costner se garde de tout nous dire. Une mise en scène et des dialogues brillants nous dévoilent, touche par touche, des hommes blessés. Ils vont être acculés à tirer de leur passé la force de surmonter leurs peurs. C’est dans une première vie heureuse, il fut marié et père de famille, que Boss trouve les mots pour pousser Charley à déclarer sa flamme à Sue. Ce dernier a été un soldat perdu, puis le porte-flingue d’homologues de Baxter, il avait tout oublié et refoulé. Il recouvre ses réflexes de tueur, son assurance et sa sauvagerie, que seuls les efforts conjugués de Boss et Sue parviendront à contenir.
Le gun fight sera intense. Le style est moderne : on tire beaucoup et à bout portant. On tue rarement, des balles frappent, des corps titubent, la vie est longue à s’échapper.
J’émettrai deux petites réserves sur ce film magnifique. La romance nouée entre les deux quadras abimés semble hâtive et empruntée. Plus gênant, pour un film d’action, est le manque de consistance des « méchants ». Baxter surjoue le tyran psychopathe. Le tueur sadique est le premier à tomber. Le marshal ripoux est plus convainquant, mais au final guère plus efficient.
Peu importe, Kevin Costner s’impose comme le successeur du vieillissant Clint Eastwood au titre de Dernier géant de l’Ouest.