Ce texte ne vient pas de moi, mais je le trouve suffisamment juste et à contre courant des louanges qui lui ont été adressé depuis sa sortie pour me permettre de le répliquer ici.
Par ailleurs cela ne m'empêche pas de lui reconnaître de belles qualités de mise en scène, ainsi qu'un casting à la hauteur des personnages "réels" qu'ils incarnent. Cilian Murphy est certes très habile dans le rôle titre et mérite toute la notoriété qui en découle car il était déjà charismatique dans les précédents films de Nolan tapis dans l'ombre des personnages principaux mais dont la présence était souvent indispensable au bon déroulement scénaristique de ces derniers.
Mais Matt Damon et surtout Robert Downey JR offrent des contrepoints/des antagonismes politiques et dramatiques essentiels aux enjeux philosophiques soulevés par Oppeheimer. C'est en grande partie ce qui rend le scénario intéressant (a défaut d'être réellement passionnant) et permet au film d'aller au dela du simple tract de propagande.
Car il semble malheureusement que le principal défaut soit de vouloir manier le grand spectacle pyrotechnique à même d'enthousiasmer le public le plus large possible à un cinéma plus confidentiel dans une veine auteuriste pour traiter au mieux les questions o combien complexes que soulèvent les enjeux nucléaires en temps de réaffirmation de la Guerre Froide ainsi que l'avènement du nazisme.
Voici l'interstice ou semble constamment s'échouer le cinéaste britannique, cherchant à schématiser au maximum les notions abstraites autant que complexes de la chimie et de sa corrolaire physique quantique pour maximiser au mieux l'efficacité des dilemmes moraux. Rendant de ce fait manichéen tout ce qui pourrait étoffer les subtilités d'un être tellement conscient mais dépassé par son intelligence et sa démesure. Ce d'autant plus que les séquences judiciaires et le procès final n'ont pour intentions finales que d'absoudre le Ptolemee redemptrédempteur de toutes responsabilités au nom du soi disant bien commun pour les États-Unis et l'humanité entière. Quid de Nagasaki, de Hiroshima (pour les cas les plus exemplaires car parmi les plus médiatisés) et d'autres pays et villes endeuillées en grande partie par sa faute? Le scénario en touche deux ou trois mots en fin de métrage, mais ne s'y attarde pas plus que de raison. Comme s'il ne savait que faire d'un fait historique mettant à mal son didactisme ultra huilé.
"Quand j'ai vu Oppenheimer, je n'ai pas osé critiquer quelques points, tellement il fut applaudi comme prouesse cinématographique, certes Nolan a fait un hommage au cinéma en tant qu'art visuel, mais pour moi à moindre degré esthétique que Terrence Malik par exemple....l'intrigue balançait dans la complexité du personnage si difficile à capter, et on perdait le fil, on ne s'ennuyait pas malgré la longueur, ca a été considéré comme atout...
mais ce film a omis une complexité plus profonde qu'il a abordée à peine, à part aussi le fait grave qu'il a omis les victimes...
ce qui fait de lui un film moralement dangereux, du fait surtout que le grand public n'est jamais assez éclairé, capte les idées comme il capte l'image sans Résistance:
Le dilemme de l'homme de science et sa responsabilité morale sont à peine abordés, quelques répliques d'Einstein pas plus...
Son "silence" face à une politique qui porte à une Incrédulité, lui si intelligent,
son regard froid qui n'a pas hésité une seconde avant la fin, qu'il est en train de fabriquer une bombe de destruction en fin de compte.
Le film aborde l'injustice qu'il a subi, mais pas dans le sens de sa responsabilité,
il en sort victime, martyrisé par les sentiers souillés de la politique américaine et même héro à qui on finit par pardonner le "crime" initial: Fabriquer une bombe.
Où est la place du scientifique face à la politique?
La responsabilité d'un scientifique est de fournir des faits, non distordus, que la politique en général cache. Sa responsabilité est l'intégrité.
Avec l'ère du nucléaire, la responsabilité fuit, glisse encore plus.
La question essentielle que le film a presque effleuré me hante et demeure sans réponse:
une bombe pour arrêter la guerre?
Et le collatéral on l'annihile. La bombe fut utilisée contre des civils. Irrévocable fait.
Paraît-il on peut tout faire sans questionnement moral aucun...
Notre statut de martyr nous fait tout pardonner, et même permettre...?!
Tuer pour la bonne cause disent-ils"
Par Yasmine Akhle, texte original à retrouver sur sa page Facebook