On est dans l'inconfort pendant la 1ère heure, parce que très rythmé verbalement, très bruyant, perturbant. Les flashs du héros pour illustrer son cerveau qui bouillonne. Le passage du noir et blanc à la couleur n'est pas du tout celui dont on a l'habitude : le noir et blanc n'illustre pas des flashbacks si bien que la temporalité est difficile à apprivoiser. Et puis, tout s'enchaine ensuite. L'escalade est passionnante. On ne s'ennuie pas un instant. Effaré souvent. Notamment par l'inhumanité des plus hauts placés. Truman en tête.
On sait très bien où ça va nous mener, cette issue dont on aurait presque oublié qu'elle est et surtout doit rester insupportable. Mais on arriverait presque à comprendre l'objectif initial d'Oppenheimer, montrer l'effet dévastateur au monde entier une unique fois, pour tuer dans l'œuf toute envie d'escalade. Mais c'était sans compter sur la nature humaine... La pratique fait souvent mentir la théorie. La phrase finale d'Einstein laisse d'ailleurs muet.
Nolan est un excellent cinéaste. Il rend certains passages terriblement viscéraux en en montrant finalement très peu. En utilisant le son avec beaucoup mais beaucoup d'astuces. L'explosion de la bombe, lors du test à Los Alamos surprend à ce niveau là, laissant avant tout place à l'émotion, palpable, bien plus qu'au spectacle froid habituel.
Et le casting est impeccable. La relation particulière d'Oppenheimer avec sa femme, sans les fioritures hollywoodiennes habituelles, est très émouvante. Dans le meilleur et dans le pire. Avec cette phrase qui restera en tête : "Ne rentre pas les draps".