Oslo, je me souviens. Ses rues, ses gens, ses bâtisses, ses nuits, ses aubes, ses ritournelles… D’un pas décidé, je fuis. Je me noie, je coule, j’oublie. Même ces eaux froides ne veulent pas de moi. Je retourne alors vers un passé qui ne m’appartient plus, dans un présent qui n’est plus mien. Pèlerinage sur les vestiges d’une vie mouvementée par des soirées intoxiquées. J’erre encore, je regarde les gens dans ce décor urbain et rien ne m’identifie à eux. Leur bonheur n’est pas le mien. Le bonheur n’existe de toute façon que pour les cons. Je préfère encore m’embrouiller les neurones dans des vapeurs alcaloïdes. C’est peut-être là ce que je suis. La nuit m’ouvre ses bras, je me sens presque revivre dans les fumées nocturnes, au cours d’une virée éphémère, pour un temps seulement. Là aussi, j’ai perdu ma place. Le jour se lève et je m'en vais. Les notes de ma partition ne sont plus en harmonie. Je ne suis plus, je veux juste en finir. Rejoindre un monde que je connais et laisser derrière moi celui de la chaire. Oslo, je me souviens. Son vide, sa noirceur, son silence… Anders, 31 Août.
Oslo, 31 Août nous entraîne dans une virée magnifique en compagnie du mal-être de son personnage Anders, parfaitement incarné par le magnétique Anders Danielsen Lie. À travers les bribes d'un passé perdu et d'un présent étranger, Anders essaye de retrouver une place dans son monde. Une journée et une nuit dans la vie d'un homme tourmenté, avec des personnes qu’il a connues ou au milieu d’anonymes. Être sensible et en marge que rien ne semble finalement sauver. Le film est bourré de moments de toute beauté baignés dans un romantisme brumeux. L’inéluctabilité de la fin nous laisse apprécier la beauté fugace du voyage.
Cette adaptation par Joachim Trier du Feu Follet, de Pierre Drieu la Rochelle, après celle de Louis Malle en 1963, révèle un mal-être intemporel. La solitude des âmes, l’isolement et l’égarement des êtres fragiles. Le cinéaste norvégien réussit à nous faire vivre ce pur moment avec son personnage, à travers lui, dans Anders. Je me sens d’ailleurs plus proche d’Anders que d’Alain, et c’est sûrement ce qui me fait préférer cette adaptation à la première. Anders tente de trouver une échappatoire à sa condition, mais au final n’y arrive pas car il n’a rien à quoi se raccrocher, alors qu’Alain ne fait que dire au revoir à son passé. C’est en tout cas là mon ressenti. Le constat est pourtant le même, l’Homme est seul face à ses démons. La mélancolie qui se dégage des deux films est aussi la même. Une mélancolie universelle et éternelle.
Je n'ai pas des angoisses, je suis dans une angoisse perpétuelle.