Je pense qu'on a beaucoup plus affaire à une autre adaptation du roman Le Feu follet de Pierre Drieu la Rochelle qu'à un remake de l'excellent film de Louis Malle, les différences étant assez significatives (l'alcoolisme remplacé par la toxicomanie, les années 1960 par les années 2010, Paris par Oslo !), mais je ne peux pas m'empêcher de comparer. Désolé, c'est plus fort que moi.
Même si le Louis Malle est plus marquant et émouvant, le jeu de Maurice Ronet plus puissant (d'ailleurs le souvenir de ce film est tellement fort que la musique d'Erik Satie utilisée dans sa BO m'est revenue sans cesse en tête pendant la vision du Joachim Trier ; mon Dieu, cette séquence sur la terrasse du café de Flore qui est celle qui visuellement est parvenue à être la meilleure pour retranscrire l'impression déchirante de solitude ; ouh là, je m'égare... !) que celui d'Anders Danielsen Lie (mais il est néanmoins excellent, rien à dire si ce ne sont des compliments ; et le comédien norvégien avait déjà prouvé dans le précédent film du cinéaste Nouvelle Donne qu'il est capable d'incarner les dépressifs !), cette œuvre venue du pays d'Ibsen est loin d'être déshonorante.
Qu'on soit dans les années 1960 ou dans les années 2010, à Paris ou à Oslo, la vision de l'extrême vacuité de l'existence est la même et présentée aussi subtilement et sobrement. En fait, le message d'ensemble est que l'intérêt de la vie réside dans quelques parcelles de bonheur très vite estompées, quelques brièvetés de relations humaines qui se dissiperont... Et donc reste à savoir si on peut s'en contenter ou pas, ou si on se laisse submerger par le désespoir, c'est-à-dire être vraiment au bout du rouleau pour ne pas plonger dans la piscine (ceux qui auront vu le film comprendront !) et se contenter de regarder comme si on était déjà ailleurs...
Le seul tort de ce film, c'est de venir après son illustre aîné. Ce qui n'est pas vraiment un tort, on est d'accord. Reste qu'il touche au plus profond de l'être, car il se montre d'une justesse irréprochable pour celui ou celle qui se sont demandé au moins une fois dans leur existence : "à quoi bon ?".