Bon, vous connaissez Cancùn et son ambiance Spring Break, foule de bikinis fluos sur postérieurs pimpants venus se trémousser en oubliant les préceptes de papa-maman.
[Pendant ce temps à Veracruz]
... pas pareil du tout ! Le littoral est maussade, le roulis des vagues susurre son ennui, et la carte postale aurait besoin de quelques manips sur photoshop pour envoyer du rêve. Voilà donc le cadre de ce modeste "motelito" Palma Real, établissement plutôt référencé "Guide du queutard". Car disons le franchement on n'y vient pas pour profiter de la piscine olympique, des chambres tout confort et du petit déjeuner copieux, inexistants, mais pour tirer son coup version couple adultère ou version idylle née cinq minutes avant dans un bar.
Sebastián, "18 ans dans trois mois", se retrouve propulsé gérant du palace pour suppléer son oncle convalescent. On entre donc dans un film de passage à l'âge adulte, où une situation imprévue oblige un jeune à grandir vitesse grand V pour faire face à de nouvelles responsabilités. On connaît la musique et on sait que le genre comporte des risques, comme le stéréotype de l'écorché vif, ou les embûches sordides qui s'accumulent un peu trop. Délicat et minimaliste, Palma Real Motel évite intelligemment tout cela. Sebastián ne sait pas se peigner certes, mais à part ça c'est un bon gars, affable et responsable, dont la personnalité se dévoile par signes ténus.
Le film évolue ensuite à l'aune d'une rencontre, et devient l'histoire d'une complicité inattendue. Dans cet antre du 5 à 7, pas de Cléo, mais une troublante Miranda de 2 à 3, mélange de regards perdus où pointe la mélancolie et de larges sourires taquins. Et de l'inattendu... la relation glisse doucement vers l'ambigu.
On sent que pour le jeune réalisateur Aarón Fernández, ce motel est un lieu qui se définit autant par ce qu'il s'y passe (les étreintes et les bavardages furtifs) que par ce qu'il ne s'y passe pas (les fameuses "horas muertas", heures creuses, du titre original). En d'autres termes le but est aussi de raconter par le silence, la langueur, la routine. Les images nous bercent donc de leur rythme indolent, et c'est à la fois l'attrait et la limite de l'ensemble. L'aide ménagère explique plusieurs fois qu'il ne se passe jamais rien ici, Fernández tient à cette idée. Mais si il est louable de vouloir construire une histoire nuancée à partir de petits riens, d'évènements fugaces, le risque est aussi de finir par anesthésier le propos. Totalement au diapason, la caméra déploie un charme sobre qui offre de jolies images, tout en laissant le sentiment que ce décor atypique, ses lignes, ses angles et ses espaces pouvaient être shootés par un oeil un peu plus inventif.
Il manque donc une pincée d'enjeu ou de fantaisie pour faire battre le tout un peu plus fort, mais grâce à ces deux personnages attachants on ne tombe jamais dans la sieste non plus... exceptée sa version crapuleuse.