Comment se refaire après l'échec de Fight Club? Alors oui, ça fait bizarre aujourd'hui, parce qu'on parle un peu du dernier grand film générationnel des 90's, porte étendard crypto-punk dont la vision géniale et le discours extralucide ont désarçonné fin 99 avant que l'exploitation VHS/DVD l'érige en bréviaire pop. Mais bon, en 2001 on en est pas là et David Fincher doit rebondir. Il jette son dévolu sur un projet "greenlighté", autrement dit une pure commande. À première vue, rien d'extraordinaire: un huis-clos, un seul décor, une nuit, peu de personnages. Sauf que pour Fincher, c'est un nouveau défi. Et on s'est aperçu que les relever c'est une simple formalité pour lui. S'il n'a pas l'ambition de retoucher à une ligne du script signé David Koepp, Panic Room sera un exercice de style doublé d'un atelier pendant lequel le cinéaste va se faire la main avec de nouvelles technologies.
Première étape ? On prévisualise. L'unique lieu sera reproduit numériquement afin de faciliter la mise en scène, permettant au réalisateur de s'offrir quelques plans "impossibles" où la caméra passe d'un étage à un autre, à travers l'anse d'une cafetière ou d'un trou de serrure. Un procédé qui offre à Panic Room un plan-séquence anthologique voyant l'objectif quadriller toute la maison du sol au plafond et renforce l'idée d'un enfermement. Sinon, l'approche se tiendra à une majorité de plans-fixes et panneautages, parsemés de rares travellings. La symbiose entre le découpage méticuleux et le montage remarquable constitue l'arme de pointe pour maintenir l'attention (et la tension) sur les 108 minutes. Sans oublier que Fincher s'offre de pures expérimentions pour faire grimper le cardio, notamment au détour d'une séquence - déjà culte - quasi-sourde entièrement au ralenti.
Vu l'excellence déployée aussi bien derrière que devant la caméra (une distribution unanimement parfaite), ce serait quand même bête de s'arrêter aux quelques facilités de son histoire (notamment la fin, un peu bâclée). Ce n'est pas le film le plus ambitieux et abouti de son auteur - qui d'ailleurs ne s'en cache même pas - mais en tant que thriller en huis-clos (ou home invasion, en anglais), c'est quand même un sacré pied. D'un point de vue technique, c'est une nouvelle leçon de mise en scène et la démonstration de ce qu'une très bonne équipe peut délivrer, de la photographie au mixage sonore sans oublier la bande originale signée Howard Shore, c'est un sans-faute. Si Fight Club a mis le temps pour être considéré comme ce qu'il était dès le départ (un chef-d'œuvre, donc), Panic Room mériterait bien qu'on arrête de le considérer comme un Fincher mineur compte tenu de ses énormes qualités que bien peu de home invasion atteignent.