In Bed(ded) with Pablo Escobar …
Benicio Del Loro est Pablo Escobar ! La perspective de voir l’ami Benicio se frotter au plus grand criminel du siècle ést alléchante même si il s’agit d’un premier film. Alors ce paradise Lost est un pur film ou a t’il été coupé pour abuser l’addict de narco-cinéma ? Réponse …
Escobar peut être un des plus grands criminels qui ait jamais vécu a un est un personnage fascinant il suffit de lire sa fiche Wikipedia pour réaliser que sa biographie peut nourrir des centaines de films.Hollywood tente de monter un projet sur lui depuis des années sans succès. Le plus avancé fut un temps le « Killing Pablo » de Joe Carnahan inspiré d’un récit de Ken Nolan (auteur du livre Black Hawk Down) qui aurait du mettre en vedette Javier Bardem. C’est finalement un projet européen produit par Dimitri Rassam pour Pathé qui arrive en tete de cette course à l' »Escobar movie ».
Mais Paradise Lost n’est en rien le « Rise and Fall » attendu, il n’est nullement question ici d’un biopic ou d’une description du fonctionnement de son empire criminel (le réalisateur-scénariste Andrea Di Stefano comédien italien dont c’est le premier film se targue même d’avoir fait un film sur Escobar qui ne montre pas une sachet de cocaïne).Même si la personnalité d’Escobar plane sur le film à la manière du colonel Kurtz d’ Apocalypse Now il s’agit bien ici de l’histoire de Nick (Josh Hutcherson) jeune canadien naïf installé en Colombie avec son frère pour installer un camp de surf qui va être amené à approcher le trafiquant en tombant amoureux d’une de ses nièces.
C’est à travers ses yeux que l’on découvre Pablo Escobar, d’abord séduit par cette figure patriarcale, charismatique un philanthrope qui certes exporte des quantités considérables de cocaïne (Maria sa nièce lui explique avec applomb que c’est une activité courante en Colombie) mais semble aimé de tous. Malgré les avertissements de son frère et ses propres soupçons Nick fait mine d’ignorer les aspects les plus sombres des activités de « El Patron » (tiens c’est quoi ces marres de sang dans les écuries ?). Jusqu’à ce que dans la seconde partie du film Di Stefano lève brutalement le voile sur la réalité de Pablo Escobar un monstre aussi machiavélique et inhumain qu’il est brillant. Le film bascule alors dans un thriller très étouffant ou Nick doit échapper aux divers tueurs et policiers corrompus que le trafiquant lance à ses trousses.
« Quand tu regardes l’abîme, l’abîme regarde aussi en toi. » Nietzsche.
Le film pose la question de la compromission morale, jusque ou peut on aller quand on fréquente le mal sans être à son tour souillé ? Il prend un aspect de tragédie antique issue de la mythologie grecque Escobar y est décrit tel un de ces Dieux qui jouent avec le vie des mortels qu’ils ruinent finalement indifférents à leur sort.
Del Toro grossi de 30 kilos, très ressemblant à son modèle campe un Escobar « énorme » jupitérien, si charismatique qu’on a aucun mal à comprendre la séduction qu’il exerce sur le personnage de Nick. Sa performance est tout en retenue presque douce, il n’a jamais besoin d’ élever la voix pour effrayer et fait planer une menace sourde chaque fois qu’il est à l’écran. Menace que Di Stefano fait d’autant mieux ressortir qu’il la place dans des situations de la vie courante, ainsi cette scène ou Del Toro règle ses « affaires » dans la maison de poupée de sa fille en même temps qu’il lui lit le « Livre de la jungle ». Je lui ai trouvé son coté « mephistophelitique » mis en valeur dans une conversation qu’il a au sujet de Dieu avec un prêtre.
Josh Hutcherson n’a pas l’envergure de Del Toro mais cela ne dessert pas en rien son personnage de jeune naïf. Bien qu’il n’ai pas réussi à mes yeux à retranscrire le dilemme moral qui tourmente son personnage dans la première partie je l’ai trouvé bon dans la seconde plus thriller en gamin effrayé dépassé qui fait tout pour survivre. Hutcherson à cette occasion n’est pas tombé dans le piège des postures de machos ou de durs à cuire.
DiStefano donne déconstruit à son récit utilisant de nombreux dont il se sert à la fois pour jouer sur les émotions du spectateurs mais aussi pour masquer puis révéler la mécanique des plans d’Escobar vis à vis de Nick. Parmi les points faibles du film je citerais les parties romantiques un peu clichés, les personnages secondaires moins développés en particulier Maria (Claudia Traisac) dont la transition de supportrice fervente de son oncle à soutien indéfectible de Nick parait bien soudaine. Le rythme de la première partie est parfois languissant avec des intermèdes contemplatifs mais lance bien une seconde ou la tension ne cesse de monter jusqu’à une conclusion sombre et très satisfaisante.
Techniquement la photo du film est très réussie, la reconstitution au Panama de la Colombie des Narcos fonctionne parfaitement. A noter la partition magnifique de Max Richter que j’ai découvert pour ma part grâce à la série « The Leftovers » dont la mélodie à la fois nostalgique et inquiétante hante le film.
Conclusion : Paradise Lost est un thriller sombre et étouffant dominé par un Benicio Del Toro charismatique et diabolique dont on sent l’influence même quand il n’est pas à l’écran.Je dois avouer que le film ne figurait pas sur mon radar des sorties et s’avère au final une très bonne surprise.
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