Twin Peaks
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Aller à la rencontre du cinéma de Jim Jarmush, c'est se plonger dans une approche résolument personnelle du 7ème art.
Art
Le mot n'est pas galvaudé car ce film porte en lui une démarche atypique, et par là même pleinement artistique.
J'aime à penser qu'il s'agit d'un cinéma total qui imbrique les arts les uns avec les autres :
- la poésie qui est en tant que tel aussi le sujet du film,
- la peinture, que ce soit dans le regard sur les couleurs et les gestes de Laura, compagne de Paterson ou dans les multiples tableaux proposés à travers les images de la vie du "héros" (parfois impressionnistes face aux chutes d'eau, parfois hyperréalistes dans le filmage de la cabine d'autobus),
- la musique : il n'est pas anodin qu'une guitare y apparaisse aux couleurs préférées de Laura ; tout un symbole. Mais c'est une bande son, une vraie, qui ne se contente pas de rapiécer des tubes les uns derrière les autres. Elle crée un univers au service du film, de nos sensations.
Poésie du Haiku
Evidemment ce qui fait l'attrait de cette oeuvre comme de nombreuses autres du réalisateur, c'est sa lenteur.
Pour ceux qui aiment l'oeuvre globale de Jarmush, il n'y aura donc pas de dépaysement.
Mais ici aussi, il prend plaisir à fusionner le thème et le traitement du film.
- sur le Fonds, puisque le film est un hommage aux poètes William Carlos Williams et Ron Padgett (dont les vers sont cités).
- sur la Forme, comme les personnages sont trainants, flegmatiques. Le "spectacle" permet donc d'installer une relation entre l'idée que l'on se fait de la poésie avec le spectateur.
Oeuvre contemplative
Loin du formatage des standards d'Hollywood, de Paris ou de HongKong, il trace une voie dans laquelle le scénario n'est pas le plus important. Comme dans "Broken Flowers" ou "Ghost Dog", il y a une histoire. Mais elle est à la fois
- au 1er plan : elle se suffit en elle-même. Pas besoin d'attributs (des événements imprévus qui créent du suspense extraordinaire au sens 1er) et pas besoin de stéréotypes (les individus sont uniques et ne représentent qu'eux-mêmes). Plus que jamais, on peut définir le cinéma de Jarmush comme contemplatif.
- au 2nd plan : les films de Jim sont des actes sociaux. La société qu'il (dé)peint est apaisée, même dans ses quelques moments de tension. Et donc les messages humanistes sont passés en subtilité même s'ils sont bien présents (usage des armes à feu ; richesse de mixité sociale ; tolérance à toutes les formes d'art etc.).
C'est tout cela qui fait que je suis fan de Jim Jarmush autant que la littérature contemplative japonaise.
Et vous ?
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Les meilleurs films de 2016, Les meilleurs films où une ville est à l'honneur et Les meilleurs films de Jim Jarmusch
Créée
le 19 janv. 2021
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