Oklahoma,fin du 19e Siècle.Jed Cooper,paisible cow-boy,traverse la région en convoyant le troupeau de bovins qu'il vient d'acheter.Mais une bande de vigilantes lui tombe dessus,les mecs l'accusant d'avoir volé le bétail après avoir tué son propriétaire.Ne s'encombrant pas de finasseries juridiques,ils le pendent direct à un arbre et s'en vont le coeur léger,avec la satisfaction du devoir accompli.Mauvais calcul car Jed est d'une étonnante résistance et survit plusieurs minutes au bout de sa corde,suffisamment pour qu'un shérif passant miraculeusement par là le décroche.Innocenté par le juge Fenton,Cooper accepte l'offre du magistrat qui lui propose un poste de marshall.Rigide,taiseux et efficace,l'ex pendu devient vite le flic vedette du coin et la terreur des bandits.Il en profite au passage pour retrouver un à un ses agresseurs et leur régler leur compte.Clint Eastwood est vraiment un pur produit du western.Révélé par la série télé "Rawhide",il n'arrivait pas à percer au cinéma et s'était exilé en Italie juste à temps pour prendre le bon wagon du spaghetti,devenant dans la foulée l'acteur fétiche du pape du genre Sergio Leone.Devenu une star mondiale grâce à la Trilogie des dollars,il est revenu dans son pays pour y poursuivre sa brillante carrière,en commençant par ce néo-western inspiré du spag.Coproducteur via sa société Malpaso,Eastwood voulait embaucher Leone à la réalisation mais l'Italien était occupé à tourner "Il était une fois dans l'Ouest" et c'est le tâcheron Ted Post qui a hérité du poste.Mais attention, c'est un bon artisan que Clint rappellera cinq ans plus tard pour shooter "Magnum Force",le second épisode de la franchise "Dirty Harry".Du reste Post livre une excellente mise en scène,alignant les plans astucieusement axés et parfaitement lisibles tout en maîtrisant le rythme et la narration.On sent l'influence du spaghetti à travers la cruauté de certaines scènes et les gros plans sur des trognes patibulaires,ainsi que dans une certaine lenteur dans la progression dramatique.Le film est coécrit et coproduit par Leonard Freeman qui s'illustrera en créant la même année la mythique série "Hawaï Police d'Etat".Le pourtant excellent Dominic Frontiere affiche ici une petite forme en signant une musique stridente peu adaptée aux images,encore plongé sans doute dans son travail sur "Les envahisseurs".Le film est bon mais on ne sait pas trop où ça veut en venir.Bien que n'étant pas scénariste,Post semble avoir une sorte de fibre progressiste commune à plusieurs de ses films."Le merdier" est très critique par rapport à l'action de l'armée américaine lors de la guerre du Vietnam et "Magnum Force" raconte comme "Pendez-les" une histoire de justice illégale et expéditive,peut-être est-ce pour cela qu'Eastwood l'a réengagé pour son "Harry 2".Un groupe de citoyens énervés prononce et applique donc arbitrairement une sentence de mort qui s'avère être une erreur car l'accusé est innocent.Ces faits courants dans l'Ouest rude et sauvage d'autrefois sont clairement condamnés et les auteurs paraissent établir un parallèle avec une auto-justice toujours prompte à resurgir aux USA.Mais d'un autre côté la sévérité juridique a l'air d'être approuvée avec la rigueur du juge Fenton qui n'hésite pas à ordonner des exécutions,même pour des faits mineurs.Ce qui donne d'impressionnantes séquences de pendaisons se déroulant devant une foule en liesse qui vient là comme à la fête foraine.On se pointe en famille,enfants compris,des marchands ambulants sillonnent le site,on chante et on rigole,c'est la sortie loisir,le genre de scènes qu'on voit aussi dans "Cent dollars pour un shérif".Le discours ambigu du film traverse le personnage de son héros,un type revanchard avide d'éliminer ceux qui ont tenté de le tuer mais qui s'émeut et proteste face à des peines qu'il estime trop sévères.Ce qui semble ressortir de tout ça est que la Justice individuelle,c'est mal,alors que celle qu'exerce la Force Publique,c'est bien,la classique doxa démocratique,quoi.Il est à noter que les agresseurs de Jed sont des hommes ordinaires,et même pour la plupart des notables de leur ville,qui croyaient vraiment pendre un criminel,ce qui induit l'idée assez juste que n'importe qui peut devenir un assassin pour peu que les circonstances l'y poussent.Eastwood,viril en diable,endosse avec charisme et autorité le rôle de ce justicier équivoque et il bénéficie de l'appui d'une fameuse distribution.La jolie blonde Inger Stevens incarne subtilement une veuve sombre et traumatisée alors que Pat Hingle impose en force son personnage de juge inflexible convaincu du bien-fondé de la Loi en toutes occasions.Il sera le partenaire de Clint dans deux autres films.Et puis il y a Ed Begley en vieux chef de milice,Bruce Dern en canaille ignoble et irrécupérable,Ben Johnson en shérif équitable,Alan Hale Jr en maréchal-ferrant redresseur de torts improvisé,Dennis Hopper en prophète illuminé,ce bon vieux L.Q. Jones et James MacArthur en prêcheur de gibet,un comédien que Freeman engagera immédiatement après pour être la co-vedette de "Hawaï Police d'Etat".