Quatre ans après le très réussi 'dernier train pour Busan', qui avait réussi à s'imposer sur le marché occidental comme un huis-clos horrifique prenant et réaliste, notamment en parvenant à instaurer une tension permanente, Sang-Ho Yeon revient donc avec Peninsula, une suite que j'attendais avec grande impatience afin de voir si le réalisateur allait réussir à me surprendre une deuxième fois.
Aïe.
Après une intro en environnement clos globalement convaincante qui rend hommage à son grand frère, le film nous expose la situation initiale en à peine quelques phrases. Façon 28 semaines plus tard, la Corée est plongée en quarantaine totale, les rares survivants sont globalement rejetés et c'est à peu près tout. On se prend alors à rêver à une utilisation intelligente de ces paramètres par le réalisateur. Hormis le traitement que reçoivent les coréens, exclus et jugés comme responsables du virus (ce qui n'est pas sans rappeler les asiatiques cibles de quolibets en début de crise du Covid) la question du statut de réfugié se pose. Enfin c'est ce qu'on serait tenté de penser dans un premier temps avant que le film ne se transforme en actionner bête et méchant.
Très rapidement on nous présente donc un groupe de mercenaires coréens, embauchés pour aller récupérer une somme d'argent sur leur péninsule natale. Visiblement quatre ans suffisent pour endommager la mémoire puisque la présence massive de zombies ne semble déranger personne. 'Une mission facile' Ah ?
On découvre donc une Corée ambiance post-apo, il faut le dire, très laide. Un mélange de carton pâte et de CGI pas bien esthétique. Ca ne fonctionne pas.
Autre grand souci lié à l'atmosphère : l'utilisation de la musique. Alors que le spectateur est sensé se sentir isolé avec les personnages dans un décor urbain dénué de vie, l'utilisation constante de la musique (et pas forcément de grande qualité) apparaît comme un véritable frein. Cette même musique viendra nuire lors de la mort de certains personnages clés, à grand renfort de ralentis et de violons, ruinant toute intensité dramatique.
A partir de ce point, les défauts arrivent pêle-mêle. Le premier réside dans les décisions prises par les personnages. Dernier Train pour Busan arrivait à convaincre de par son réalisme, ainsi les actions des protagonistes étaient toujours cohérentes et quand bien même les personnages se mettaient en danger, c'était à chaque fois compréhensible et assez naturel (actions découlant du stress, de la peur voire de l'égoïsme.) Ici, voire un mercenaire surentraîné ramper sur un cadavre sans même vérifier qu'il soit bien mort alors qu'il est armé d'un fusil à silencieux agace. Dans le même ordre idée, la fin - qui consiste en un sauvetage ubuesque de personnage qui finit par se sauver lui même - ne fonctionne absolument pas.
Idem, les règles changent entre les deux films. Dans le premier volet, les zombies sont attirés par le bruit mais reposent surtout sur leur vue. Si l'on ferme un rideau, les morts abandonnent la poursuite. Ici, si un personnage s'enferme dans un lieu clos sans être vu, les zombies n'abandonnent pas. Pourquoi ?
Mais au-delà de ça, l'aspect réellement gênant du film demeure son manque d'identité. Dernier Train pour Busan était un survivor purement horrifique. Les zombies étaient la menace identifiée, et les personnages cherchaient à fuir et survivre, de mémoire aucun zombie n'était même abattu. Ici on est globalement sur de l'actionner bête et méchant où les zombies servent de chair à canon et de toile de fond. Mais cette étiquette n'est pas assumée. Les passages alternent entre des plans séquences fusillades à la John Wick, des grosses bastons façon Johnnie To, des sauvetages comiques à la Zombieland et des courses poursuites bessonesques visuellement abominables, complètement ratées et bien trop nombreuses.
En refusant de choisir un genre, Peninsula perd toute forme d'authenticité et de réalisme. En ajoutant à ça des problèmes de rythme, des situations gaguesques, une intrigue et des personnages sans intérêt (que ce soit les héros ou les antagonistes) et une avalanche de scènes d'action, le film finit par épuiser voire ennuyer le spectateur. Aussitôt vu, aussitôt oublié , Peninsula restera pour moi un Fast & Furious avec quelques zombies, réalisé par le cousin asiatique de Michael Mann et avec le stagiaire de troisième responsable des effets spéciaux.