Le mariage de son ami Felix Leiter (David Hedison) ayant tourné au carnage à cause de Franz Sanchez (Robert Davi), un baron de la drogue voulant se venger de l’homme qui avait failli le faire tomber, James Bond (Timothy Dalton) se met à traquer le criminel, jurant de ne s’arrêter que lorsqu’il aura sa peau. Au risque de se mettre le MI6 à dos…
Timothy Dalton avait déjà impressionné dans l’excellent Tuer n’est pas jouer, où il apportait une fraîcheur appréciable au personnage de James Bond en lui donnant davantage d’émotions, donc d’humanité. Il continue sur sa lignée tout en suivant le chemin tout-à-fait opposé… Si James Bond est toujours poussé par ses émotions, il ne les manifeste plus du tout, le film se résumant à une vendetta personnelle de la part de l’agent secret, assez étonnante dans la saga.
Ce qui l’est moins, en revanche, ce sont les péripéties : des combats entre plongeurs aux fusillades dans des laboratoires secrets, on a l’impression d’avoir déjà tout vu ailleurs. On note toutefois un retour à une certaine originalité dans la scène d’action finale, poursuite en… camions-citernes, aussi jouissive que risquée : si l’on y compte quelques merveilleuses trouvailles, il est difficile de faire passer une poursuite entre des véhicules lents pour un climax de film d’action.
Pourtant, force est de reconnaître que John Glen, s’il ne signe pas ici son meilleur James Bond, est toujours en forme. C’est surtout son directeur de la photographie Alec Mills qui l’est, comme toujours, nous offrant une bonne dose de plans savamment étudiés. Car, au-delà de son côté déjà vu, s’il est une chose qu’on ne peut pas enlever à ce James Bond (comme à tous les autres), c’est son professionnalisme. Du casting à l’équipe technique, tout le monde est à sa place et accomplit son travail avec une énergie plutôt communicative.
Au niveau des acteurs, Timothy Dalton se place encore une fois comme un James Bond mémorable, sans nul doute un des meilleurs, tandis que Robert Davi révèle une belle présence à l’écran, quoiqu’il n’entre pas au panthéon des meilleurs méchants de la saga. Notons d'ailleurs qu'il se fait régulièrement voler la vedette pendant le film par un petit jeune à la carrière plus que prometteuse : un certain Benicio del Toro...
Là où, en revanche, on ne peut qu’être ébloui, c’est dans le choix des James Bond girls : Maryam d’Abo nous avait déjà fortement tapés dans l’œil dans le volet précédent, Carey Lowell et Talisa Soto perpétuent la tradition ici. En plus d’être de magnifiques femmes – ce qui est un bon début, mais est rarement suffisant –, elles se montrent d’excellentes actrices, donnant à leurs personnages une belle subtilité. Elles incarnent d’ailleurs sans doute la plus belle représentation de la gent féminine dans la saga, trouvant un bel équilibre entre ces deux extrêmes peu souhaitables que sont la femme-objet (on aime bien Ursula Andress, mais…) et la femme reconvertie en homme (qu’on se souvienne de Grace Jones). Ici, les personnages féminins sont admirablement traités, assumant leur féminité sans jamais l’exacerber outrageusement, ou au contraire l’effacer derrière une apparente virilité par trop déplacée.
Ainsi, par le talent d’un casting parfait, d’une mise en scène aux petits oignons, et d’un scénario d’une étonnante gravité pour un James Bond, Permis de tuer réussit à faire oublier ses quelques temps morts et un certain manque d’originalité pour se révéler encore un film convaincant, et nous rappeler que la période Timothy Dalton aurait dû durer bien plus longtemps… Malheureusement, le sort en décidera autrement, mais James Bond survivra envers et contre tout. Et finalement, c’est bien le plus important.