Le premier film de Danny Boyle est une perle culte, une petite bombe d'énergie qui place l'humour noir à un haut niveau, un geste radical qui presque trente ans plus tard n'a rien perdu de son style.
Sous la forme d'un délire presque immature qui placerait trois amis dans une collocation rêvée et les pousserait tranquillement au massacre, le réalisateur dont on connaitra le futur reconnu place d'emblée la barre très haut avec ce qui reste l'une de ses meilleures œuvres.
L'ouverture, avec l'un des génériques les plus originaux et mémorables de l'histoire du cinéma (la virée sous speed au son de la trance inégalable du génial groupe Leftfield) démontre d'emblée la capacité qu'a Boyle d'emmagasiner toute sa culture cinématographique et musicale pour mieux la dynamiter et n'en respecter aucun code ou pour, du moins, les détourner.
Lorgnant du côté de l'horreur (la musique qui imite clairement celle de Carpenter), parodiant l'humour anglais décalé (l'inspecteur de police délicieusement cliché mais malin), rebattant les cartes du thriller, ... il imprègne tout le récit d'une perversité qui ne s'embarasse jamais de morale, ce qui fait un bien fou.
Petits meurtres entre amis perd peut-être un peu de son audace et de sa vitalité dans une dernière partie plus convenue, avant une explosion finale d'une heureuse perversité remarquable, retrouvant l'horreur ironique qu'il avait laissée un temps de côté.
Aussi corrosif qu'éprouvant (notamment dans sa violence physique et ses sensations de douleur), aussi terrifiant qu'hilarant, ce film est une petite merveille pop, un jeu de massacre entre potes qui a tout du fantasme cinématographique de jeune adulte. 1h30 d'énergie, d'efficacité et d'intelligence, tant de mise en scène, de jeu (probablement le meilleur rôle d'Ewan McGregor) que d'écriture, qu'on pourrait se repasser en boucle, et que n'atteindra peut-être plus jamais son réalisateur.