Il y avait longtemps que je n’avais pas vu un film d’action aussi percutant que Piège de Cristal (1988) ! Mettant en vedette un Bruce Willis aux portes de la gloire, ce film en huis clos concentre d’après moi les ingrédients essentiels d’un bon film d’action made in U.S.A.

Pour commencer, il dispose d’un très bon héros, ou devrais-je dire d’un très bon anti-héros. Eh oui ! Bien que John McClane soit un policier new-yorkais, il n’apparaît guère en position de pouvoir dans l’histoire. On peut même dire qu’il en chie de bout en bout. Venu à la base à Los Angeles, dans le Nakatomi Plaza, dans l’espoir de se réconcilier avec sa femme, il est tout sauf disposé à devoir déjouer une menace terroriste. Dans la précipitation, il va même oublier de se chausser ! Ainsi, on le voit évoluer pieds nus sur toutes sortes de surfaces tout le long du film, et je trouve cette idée brillante. Il n’a pas le standing de Superman et est dès le départ désavantagé sur tous les plans. Il n’a qu’un pistolet et ne porte qu’un marcel blanc avec un pantalon tout ce qu’il y a de plus basique ; par-dessus le marché, il est pieds nus ; et il doit vaincre pas moins de treize terroristes surarmés. Bien entendu, c’est sa force de volonté et sa capacité à tirer profit des ressources à sa disposition qui l’amènent à accomplir l’impensable.

En outre, ce qui fait de John McClane un personnage si fort et irrésistible, c’est sa personnalité. C’est un gars normal accroc à la cigarette et qui, malgré l’urgence de la situation, reste fidèle à lui-même en faisant de l’humour noir notamment, ce qui apporte un florilège de répliques géniales. J’ai particulièrement aimé son échange radiotéléphonique avec une opératrice qui lui déclare « Qui que vous soyez, attention, cette fréquence est exclusivement réservée aux urgences. » et qu’il répond « Sans blague ! Et vous croyez que j'appelle pour commander une pizza ? ». Aussi, il est provocateur et n’hésite pas à narguer Gruber, le chef des terroristes, à chaque fois qu’il élimine un de ses sbires, ce qui le rend d’autant plus cool. On constate aussi qu’il est dissident au sein même de la police. En effet, lors d’un échange avec un des malfrats, il admet de lui-même ne pas être doué pour suivre les règlements, préférant faire les choses à l’instinct. C’est d’ailleurs cette propension qui le met en porte-à-faux avec les renforts, sauf aux yeux du sergent Powell.

Enfin, tout ça pour dire que John McClane est un personnage central imparfait mais réussi sur toute la ligne ; il a de la dimension et se montre héroïque à sa façon. Et cerise sur le gâteau, ce n'est pas le seul personnage réussi !

L’antagoniste, Hans Gruber, est également remarquable. Génialement interprété par le regretté Alan Rickman, cet homme, qui est allemand, se présente comme un pur psychopathe. A la tête d’une équipe très organisée qui prend en otage une trentaine de personnes dans le Nakatomi Plaza, il démontre dès le départ qu’il ne bluffe pas et n’hésite pas à tuer quiconque se met en travers de son chemin. Mais je trouve Gruber surprenamment sophistiqué aussi, et voir son interprète – Alan Rickman - esquisser des sourires à certains moments m’a fait tout drôle (étant donné que je l’ai longtemps connu en tant que Severus Rogue dans Harry Potter, lequel ne sourit jamais).

En somme, au niveau des personnages, on est sur du lourd. Il y a en a juste deux que je n’ai pas aimé des masses. En premier, je citerais Argyle, le chauffeur. Il représente un comic relief type du cinéma américain des années 1980-1990 : le Noir souriant et servile. Ce dernier se prend d’affection pour McClane direct et va jusqu’à lui proposer de l’attendre au pied de l’immeuble toute la nuit au cas où ses réconciliations avec sa femme échoueraient. Et puis quoi encore ? Je sais que ces représentations ne se voulaient/veulent pas forcément offensantes mais je ne peux pas m’empêcher d’y réagir. Puis le deuxième personnage qui m'a irritée est le chef-adjoint Robinson, qui est le cliché-même du flic bouché et guignolesque qui se méprend sur le héros. Grrr ! Enfin, mis à part ceux-là, et Holly, l’épouse de McClane, que je trouve quelconque, les personnages sont très appréciables.

Et ce n’est pas fini, car la mise en scène est juste virtuose ! Gérée avec une précision d’orfèvre, celle-ci confère effectivement toute sa puissance et son efficacité au film. Pour commencer, on prend le temps qu’il faut pour présenter chaque personnage et sa fonction, sans s’étendre inutilement ; après que l’on a vu McClane gagner le Nakatomi Plaza et retrouver sa femme avec qui il est en conflit, entrent en scène les terroristes et là, le rythme s’accélère (sans que l’histoire n’en pâtisse). A mesure qu’ils assiègent les lieux et prennent des otages, on se rend compte de leur dangerosité – il sont armés jusqu’aux dents, préparés et compétents -. Mais avec McClane dans la nature, les plans de Gruger sont contrariés. S’engage alors un cache-cache sanglant entre eux entre les murs et étages de l’immeuble, la tension ne cessant de grimper, et ce jusqu’au final explosif. C’est simple, je ne me suis pas ennuyée une seconde, l’histoire étant pleine de rebondissements et plus que tout structurée avec une grande rigueur. Partie 1 : on pose une situation maritale imparfaite pour un héros qui n’en est pas vraiment un / Partie 2 : les ennuis arrivent et McClane doit évaluer la situation pour être à même de contrattaquer / Partie 3 : alors que tout semble désespéré pour ce dernier, le vent tourne. Un mot : parfait.

Pas étonnant que ce film soit considéré comme une, sinon LA référence, du cinéma d’action : il est spectaculaire à tous les niveaux et totalement jouissif ! Rarement un film contenant autant de fusillades et d’explosions ne m’aura paru aussi intelligent, en tout cas.

Bref, Piège de Cristal est à la hauteur de 8/10 pour moi.

MalaurieR
8
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le 6 août 2023

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