Avec sa production chaotique comprenant changements de producteurs, changements d'acteurs, intempéries et accidents divers et variés, Pirates a bien failli devenir l'Homme qui tua Don Quichotte de Roman Polanski. Pourtant, aujourd'hui encore, Pirates fait partie de ces plaisirs coupables, imparfaits mais délectables, que l'on se surprend à apprécier à sa juste valeur...
Deux pirates, un capitaine malin et vicieux (incommensurable Walter Matthau, comme un poisson dans l'eau) et son jeune acolyte aussi candide qu'angélique (notre Chris Camion national, alors batteur du groupe de rock Koeur's et dont c'est ici le premier long-métrage), se font ramasser à la mer par un galion espagnol. S'en suit une mutinerie qui va emmener nos deux pirates dans une folle aventure pleine de rebondissements. Et c'est déjà là que le bât blesse : Polanski et son comparse Gérard Brach en font des tonnes dans un scénario qui n'en finit jamais.
En omettant volontairement les habituelles longueurs propres au cinéaste, Pirates n'arrive jamais à trouver un équilibre adéquat, alternant entre séquences ou passages humoristiques hilarants et vrai film d'aventures. Point fort : le long-métrage est d'un réalisme saisissant, livrant parfois ce qui pourrait s'apparenter à un documentaire sur la vie des pirates du XVIIe siècle, comprenant mutineries à foison, trahisons, tortures et langage ordurier noyé dans du rhum. Point faible principal : les retournements de situation sont hélas légion, découpant constamment le film en plusieurs arcs narratifs finalement assez redondants.
Film bâtard mais néanmoins jouissif grâce à des acteurs survoltés, des décors à grande échelle et des costumes saisissants, production semi-épique souffrant malheureusement de combats mollassons et d'une musique souvent inappropriées, Pirates n'est pas le film du genre le plus mémorable mais arrive à s'inscrire sans problème parmi les plus drôles et les plus réalistes.