Honoré a-t-il réellement une patte qui lui soit propre ? Un style ? Une véritable inventivité ? Excusez-moi d’être si virulente, mais quand je vois Vincent Lacoste caressant la tombe de François Truffaut, j’estime avoir le droit d’émettre quelques doutes. Et n’est pas François Truffaut qui veut — personne d’ailleurs, excepté lui-même.
Mon problème avec ce film est qu’il transpire de références au point d’en perdre son identité. La bande originale est certes très sympathique, les personnages mettent des casques sur leurs oreilles et nous emportent dans de très belles envolées musicales, jusqu’à ce que l’on se rappelle de cette fabuleuse scène de Mommy chez Xavier Dolan, et que l’on grince des dents. Les dialogues quant à eux, sont d’un cliché que nous connaissons déjà chez Honoré (les insupportables déclamations de Louis Garrel dans La Belle Personne à l’appui) et tombent presque systématiquement à plat. Presque en effet, car certaines scènes s’illustrent par leur humour, qui réussit toujours, et souvent grâce au jeu de Vincent Lacoste et de Denis Podalydès (qui nous livrent tous deux dans une scène géniale, une délicieuse chorégraphie). Vincent Lacoste porte brillamment son rôle, qui malheureusement, ne diffère pas de tout ce qu’il a incarné jusqu’ici. De son côté, Pierre Deladonchamps, peut-être du fait de son irritant personnage, n’arrive à saisir les sentiments du spectateur. Il récite ses lignes, et cela se ressent. Denis Podalydès en revanche, s’impose en ressort comique de ce trio loufoque, et séduit par sa vulnérabilité, ses hontes.
En outre, pour demeurer encore un temps dans l’éloge, la photographie, que l’on doit à Rémy Chevrin, est impeccable. Je salue ce formidable camaïeu de bleu, et les beaux tableaux que sont les scènes de baignoire chez Jacques, tout comme le choix des décors qui, bien qu’ils nous imposent encore une fois les Dieux d’Honoré — Koltès par-ci, Koltès par-là — reflètent la vie de ses personnages, leur personnalité.
Si Honoré n’a une nouvelle fois, pas réussi à me séduire, je vois en Plaire, Aimer et Courir Vite, mon film favori de sa part, sauvé in extremis par son humour très doux, de belles images et des acteurs investis. Néanmoins, il me reste impossible de décréter qu’un film est un succès, lorsqu’il lui manque un « metteur en scène » pour reprendre le titre de notre François préféré. Honoré je t’en supplie, abandonne tes idoles, et laisse parler tes mots. Ainsi, dans les rues de Rennes des années 1990, je suis sûre que tu m’emmènerais faire une fort belle ballade sous la nuit étoilée.