Delon en large
Ha ha. Sacré Alain. Si votre route croise ce "plein soleil" par le biais du DVD ou du Bluray, bref du support physique, ne ratez sous aucun prétexte la petite interview de Delon dans les bonus. Non...
Par
le 18 juil. 2013
78 j'aime
10
Que voici une critique qui va me valoir j'en suis certain l'ire de tous les thuriféraires d'Alain DELON. Si je ne nie pas que mon appréciation modérée, voire franchement hostile de l'homme, peut à mon corps défendant influer sur ma réception critique de l'acteur, je pense avoir assez de recul et d'intelligence pour passer outre mes limites morales vis à vis du personnage et savoir commenter le comédien avec assez d'objectivité et d'honnêteté intellectuelle pour ne pas tomber dans le piège du jugement, qui plus est post mortem.
Delon pour moi n'a jamais été un acteur exceptionnel dans le sens où selon moi il ne joue pas, il fait du Delon. Il est d'ailleurs intéressant de noter que les films les plus commentés, les plus appréciés de sa longue filmographie doivent bien plus à leurs réalisateurs ou aux partenaires de Delon qu'à lui.
C'est un acteur qui a eu l'immense chance de retenir l'attention de grands noms de la mise en scène, qui ont su lui écrire des rôles sur mesure, à savoir et en schématisant beaucoup, des hommes solitaires, y compris dans des groupes, dont la morale emprunte tant à l'imaginaire de la pègre qu'à celle du policier désabusé. Ce que l'homme a toujours mis en avant dans ses interviews, sa rencontre avec le milieu interlope du grand banditisme parisien, ses accointances avec le milieu des proxénètes et ses valeurs érigées en dogme de la parole donnée et de la fidélité - notion avec laquelle il prouvera ses propres limites vis à vis des femmes ou de ses enfants, mais on n'est pas là pour faire du sensationnalisme - qu'il retranscrit systématiquement dans ses films les plus connus ou mémorables.
Sortez Delon de ces rôles et ses prestations sont moyennes, voire embarrassantes. Il n'a jamais excellé, loin s'en faut, dans la comédie, ses tentatives dans le cinéma d'ADN américain ou totalement américains tels le western ou le film catastrophe sont risibles. Delon, selon mon humble avis mais que je partage, a besoin pour exister à l'écran soit d'un directeur d'acteur exceptionnel, Joseph LOSEY lui a je pense offert son plus grand rôle dans Mr. Klein (1976) où il joue réellement ce personnage ambigüe et ne fait pas du Delon, soit d'avoir des rôles pensés et écrits pour lui dans lesquels justement il peut s'exprimer en Alain Delon, ses valeurs, ses pensées, sa vision de ce qu'est le monde et comment le traverser. Luchino VISCONTI pour Le Guépard (1963), m'apparait être un bon exemple de ce que j'avance, le personnage incarné par Delon, c'est du Delon brossé à l'aune de l'époque où se situe le sujet du film, mais mettez un autre acteur et le film conservera toute sa puissance et je tiens ce film comme étant pas loin de la perfection. Dans son casting me restent davantage en mémoire les prestations de Claudia CARDINALE, dont je suis amoureux depuis que mes hormones se sont réveillées ou de Burt LANCASTER.
La récente disparition de cet acteur m'a néanmoins donné envie de découvrir quelques films qui rentrent dans le cercle de ses films les plus cités, en réalité ils sont deux qui manquaient à ma cinéphilie : La Piscine (1969) que je me languis de voir surtout pour Romy SCHNEIDER et Plein soleil (1960) qui nous intéresse ici.
Je suis navré mais si je suis loin d'avoir passé un mauvais moment, je ne suis pas pour autant particulièrement convaincu par cette proposition. Entendons nous bien, la réalisation et la mise en scène sont difficiles à mettre en défaut, la photographie est remarquable et traduit parfaitement l'idée du titre, à savoir celle du crime organisé et perpétré en pleine lumière, en plein jour et malgré cela serti d'une ombre dissimulatrice qui fait toute la force du récit. Le drame s'opère sous nos yeux de spectateurs tout autant que sous celui des protagonistes, sans jamais s'afficher pleinement, juste par touches successives qui une fois réunies vont nous révéler l'astuce. Est-ce que Delon y apporte autre chose que son magnétisme et son charisme de bellâtre ? J'ai des doutes. Je trouve d'ailleurs le reste du casting sans grand intérêt non plus, fades, donnant l'impression de servir de faire valoir à leur partenaire, avec parfois l'impression qu'ils ne jouent pas dans le même film. Oui je sais je frôle l'hérésie.
Alors oui, le film se laisse regarder, il est bien usiné, on sent qu'un artisan en pleine possession des ses moyens est à l'ouvrage, le scénario est précis et l'adaptation du roman de Patricia Highsmith rend hommage au livre originel tout en y insufflant assez de personnalité pour en faire une proposition artistique qui fonctionne en tant que telle. Mais je me fais la même réflexion que pour le guépard : Delon a t'il vraiment contribué à la réussite du film par sa présence et son jeu ou simplement mis sa plastique photogénique au service de sa légende naissante ? Je me garde le droit de ma pensée mais vous devriez voir où elle se situe.
Ce film que je conseille malgré les limites que j'expose m'a donné toutefois envie de revoir Le Talentueux Mr Ripley (1999) afin de réaliser s'il s'agit d'un remake du "plein soleil" de René Clément ou d'une autre adaptation du roman original. Les arguments critiques n'étant alors pas les mêmes.
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Ma collection personnelle par ordre chronologique, Les meilleurs films de 1960 et MON ANNEE 2024 EN CINEMA, FILMS VUS POUR LA PREMIERE FOIS CETTE ANNEE.
Créée
le 23 sept. 2024
Critique lue 18 fois
2 j'aime
4 commentaires
D'autres avis sur Plein soleil
Ha ha. Sacré Alain. Si votre route croise ce "plein soleil" par le biais du DVD ou du Bluray, bref du support physique, ne ratez sous aucun prétexte la petite interview de Delon dans les bonus. Non...
Par
le 18 juil. 2013
78 j'aime
10
Alain Delon a 22 ans. Il n’a pas encore oublié que, titulaire d’un CAP de boucherie, il a appris le métier auprès de son beau-père, que pour fuir la charcuterie, il s’est engagé dans la Marine...
le 2 août 2018
76 j'aime
28
Comme il y eu "La Bandéra" de Julien Duvivier pour Jean Gabin, il y a "Plein Soleil" de René Clément pour Alain Delon. Ce grand classique du film noir, c'est la naissance d'un mythe. Le mythe Delon...
le 23 sept. 2013
57 j'aime
5
Du même critique
Rodrigo SOROGOYEN m'avait déjà fortement impressionné avec ses deux premiers longs métrages Que Dios nos perdone (2016) et El Reino (2017) et les échos que j'ai eu du précédent sorti avant celui-ci...
le 2 mai 2023
9 j'aime
2
Alors que jusqu'ici David LYNCH n'avait réalisé que quelques courts métrages expérimentaux et un premier long métrage Eraserhead (1976) qui le classaient parmi l'avant garde artistique et lui...
le 3 oct. 2022
9 j'aime
5
Retrouver la société de production de Mel BROOKS au générique de ce film n'est pas si étonnant quand on se souvient que le roi de la parodie américain avait déjà produit Elephant Man (1980).Un autre...
le 3 oct. 2022
7 j'aime
4