Ponyo sur la falaise
7.4
Ponyo sur la falaise

Long-métrage d'animation de Hayao Miyazaki (2008)

Connaissez-vous la thalassoponyothérapie ? Asseyez-vous. Pour une première séance, ne dépassez pas trois minutes.


Je ne me lasse pas des premières scènes de Ponyo sur la falaise. Vous êtes poisson. Je suis la mer. À moins que ce ne soit l’inverse. Tout y est beauté, calme et volupté. La musique symphonique, la grâce marine et iodée, la délicatesse infinie d’une nature assagie, apaisée, végane et irénique. Les poissons et les méduses sont mes amis. Les bestioles et le bestiaire rampants, flottants, ondulants jouent dans l’onde. La mer est belle, la lumière surnaturelle. Stoppez vite la projection. Car, sans transition, la trop humaine pollution déferle à l’écran. Je tousse, pleure, crache. Putain d’humains !


Ceci dit, réduire Ponyo sur la falaise à sa séquence d’ouverture serait un affront au Maître. Ponyo est un poisson à demi-humain, qui à force de la volonté, va se faire petite d’homme. Bousculant conventions, interdits et coutumes, faisant fi des ordres de son sorcier de père, des équilibres cosmiques et des risques encourus : « Ponyo veut des mains et des pieds ! »


Ponyo s’adresse au bambin naïf qui sommeille, ou devrait sommeiller, en chacun de nous. Ponyo aime et se donne les moyens de rejoindre l’objet de son amour, quitte à affronter son père, à fâcher sa mère et à mettre en péril, involontairement, la pérennité du monde. L’amour enfantin ne compte pas et ne triche pas. Miyazaki demeure réaliste, l’enfant ne peut pas tout, tout seul. La réussite de sa quête exigera l’aval d’une divinité bienveillante, ici la mère océan, et, plus difficile encore, l’amour sans condition d’un être humain.


Dans un monde de l’animation voué au manichéen et au simpliste, les personnages de Miyazaki revendiquent leur complexité, conservant leur part de mystère. Les pensionnaires accablées de la maison de retraite reprennent gout à la vie. Le sympathique père de Ponyo se révèle un misanthrope sorcier, voire un savant fou décidé à éradiquer l’espèce humaine, comme au bon vieux temps du Cambrien. Il se laissera attendrir.


Tout est grâce.
• La charmante scène de colère amoureuse, Lisa abandonnée sur le canapé.
• Les messages par signaux lumineux de Sosuke à son père marin, une idée reprise avec les drapeaux « flottants » de La Colline aux coquelicots de Goro.
• Le cimetière de bateaux, l’équivalent marin du panthéon aérien de Porco Rosso.
• Sans effets spéciaux, mais par le seul travail du crayon, la mer déferle, les poissons jaillissent, Ponyo court sur le tempête sur la musique triomphante de Joe Hisaishi, aux faux airs wagnériens.
• Les ombres paisibles et désormais familières des monstres marins, arpentants, nageants et flottants.
Pas belle la vie ?


https://www.senscritique.com/liste/Filmographie_commentee_de_Hayao_Miyazaki/1154726

Créée

le 12 janv. 2018

Critique lue 1.6K fois

54 j'aime

9 commentaires

Step de Boisse

Écrit par

Critique lue 1.6K fois

54
9

D'autres avis sur Ponyo sur la falaise

Ponyo sur la falaise
Hypérion
9

Ponyo aime le jambon ! Et Sosuké ! Et la vie ! Et nous aussi !

Film pour (petits) enfants complètement hallucinatoire, Ponyo sur la falaise est un ravissement de couleurs et de mouvements, regorgeant de poésie. Simple et complexe à la fois, il s'adresse au gamin...

le 30 août 2011

133 j'aime

22

Ponyo sur la falaise
Aurea
7

Vers la paix et l'harmonie

Joli film d'animation "hand-made", plein de poésie, de magie et d'humour, une histoire d'amour fou entre Sosuke, charmant petit garçon de 5 ans, et la jeune poisson rouge qu'il a sauvée et baptisée...

le 5 déc. 2011

89 j'aime

27

Ponyo sur la falaise
Fritz_the_Cat
8

Tendresse wagnérienne

Chez Miyazaki, la frontière est en soi une idée poétique. Prisonniers entre le sol et la stratosphère, les pirates du Château dans le ciel n'avaient pour limite qu'une cité inatteignable, véritable...

le 13 oct. 2015

66 j'aime

17

Du même critique

Gran Torino
SBoisse
10

Ma vie avec Clint

Clint est octogénaire. Je suis Clint depuis 1976. Ne souriez pas, notre langue, dont les puristes vantent l’inestimable précision, peut prêter à confusion. Je ne prétends pas être Clint, mais...

le 14 oct. 2016

127 j'aime

31

Mon voisin Totoro
SBoisse
10

Ame d’enfant et gros câlins

Je dois à Hayao Miyazaki mon passage à l’âge adulte. Il était temps, j’avais 35 ans. Ne vous méprenez pas, j’étais marié, père de famille et autonome financièrement. Seulement, ma vision du monde...

le 20 nov. 2017

123 j'aime

12