Porco Rosso
7.7
Porco Rosso

Long-métrage d'animation de Hayao Miyazaki (1992)

Porco Rosso est un ghibli clé de Miyazaki. Parfois injustement boudé, globalement moins apprécié que les autres ghibli, c'est pourtant une magnifique carte postale des deux fantasmes assumés de l'auteur : l'Europe et l'aviation.

On y découvre un personnage plein de tendresse, Marco Pagot, une gueule cassée de la PGM qui est présenté dans un dialogue entre son humanité et son traumatisme qui le déshumanise, ce qui est particulièrement fort dans une société capitaliste en crise post PGM qui a tendance à déshumaniser de plus en plus les marginaux et les plus pauvres. Porco Rosso est un survivant au caractère qui n'est ni idéal, ni trop sombre : c'est un type avec des principes, détesté par son univers social, têtu, acariâtre et laid. Le fait que ce caractère n'évolue pas du début à la fin est une très bonne chose car ça le rend plus crédible, plus profond, plus immuable en quelque sorte et donc beaucoup plus humain. Parce qu'un trauma ou même un simple "défaut" de caractère ça ne se règle pas comme ça. Pas de happy ending assumé, et donc le caractère un peu sucré salé du personnage qui aurait pu paraître cliché reste au final un élément très réaliste et tragique de sa vie : il a gagné, mais il sera éternellement un triste cochon dont l'humanité est enfouie sous un lourd traumatisme. C'est peut-être pas la fin la plus touchante des ghibli, mais ça laisse songeur.

Les paysages sont magnifiques, de l'Adriatique à Milan, tout l'environnement du film m'évoque un sentiment de sublime entre la solitude presque gothique des îles et la joyeuse misère de Milan qui sombre dans un fascisme très subtil. Le film crée une lunette vers un univers particulier qui est l'Italie selon Miyazaki et assister à ça est très touchant. Par son dessin, il rend quelque chose de tangible et de sensible à la fois, ce n'est pas n'importe quel environnement. Chaque film ne fait pas le choix de s'attarder autant sur son cadre, et ce n'est pas un mal du tout, mais c'est une proposition propre à beaucoup des films de Miyazaki et perso ça me touche beaucoup, en fonction des films bien sûr.

Les relations entre les personnages marchent à merveille, en fait il n'y a pas un seul personnage qui ne veuille pas dire quelque chose, par son design, ses dialogues, etc. On utilise vraiment l'animation au service de ce que veulent dire chacun et donc on a pas juste des coquilles vides dont l'apparence pourrait être totalement interchangeable et distinguée du reste. Dans Porco Rosso comme dans n'importe quel bon film d'animation, la narration et sa force évocatrice dépend de l'animation. Beaucoup de scènes, m'ont profondément ému.

Les scènes d'aviations sont là aussi très très bien, même si je les trouve plus au service de l'humour du film en général. Elle sont en tout cas classes et fluides, c'est élégant et justement pas trop premier degré.

Le fait que le film soit humoristique le rend en fait encore plus fin et mature, je trouve. C'est une observation que je pourrais vraiment développer malheureusement, mais ça me fait vraiment cet effet là. Comme pour Le Témoin : un humour au second degré souvent caustique qui rend le fond du récit encore plus lourd de sens. Encore fois cet humour passe par une animation au poil et des dialogues très bien écrits.


Leodegar, le 26 mai 2023

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le 27 mai 2023

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Leodegar

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