Il m'aura fallu du temps pour digérer ce film. Je ne sais pas si je l'aime… en tout cas je m'en rappelle, et il vaut clairment le coup d'être vu. C'est aussi dur d'écrire une critique, j'ai plutôt des bribes. Le flim annonce tout de suite la couleur, un enfant et des vaches, et déjà la tension est partout. Dans le cadre, dans le montage un peu nerveux et surtout dans le son. Tonnerre et aboiement, rien de bien concret, mais on le sent mal … on sent le mal.
Les chiens, omniprésents, sont justement sont assez représentatifs du film. Ils ne font rien de spécial à part vivre leur vie de clébard, ils se bagarrent, ils trainent partout et surtout pas là où la direction d'artiste voudrait. Une sorte de nature ni dompté, ni vraiment sauvage, pas franchement innocents et surtout pas le genre de toutou dont tout le monde est amoureux, au contraire ils provoquent un certains rejet. Alors que se passe-t-il quand ils subissent un excès de rage humaine un peu amplifié, quand ils se prennent un grand coup de savate, des planches en tôle sur le coin de la tronche ? IIs l'ont bien mérité, c'est triste ? Et cet homme qui abat son arbre, il fait un boulot comme un autre, c'est pas franchement de la déforestation (si ça se trouve il entretien au contraire), mais pourquoi on a ce sentiment mitigé d'agression de la nature ? Dès qu'il se passe le moindre truc qui sorte un tout petit de l'ordinaire dans ce film, le mal est partout.
C'est ça que recherche Reygedas, l'hyper-réalisme est traversé par quelques extrapolations et amplifications, en partie hors champs comme le coup de feu, qui révèlent tout ce que l'on a envie de projetter sur une scène, autant que ce que l'on ne voudrait pas voir … et qui d'ailleurs n'arrive pas. Un peu trop de silence et de regards fixes dans un sauna echangiste, des coups de pieds dans des tôles et surtout ce regard serré, qui nous rappelle le notre quand tout va vite, et d'un seul coup tout ce qui est hors champs veut du mal à ce film. Le malin, avec cornes de diable, jambes de bouc et penis bien humain, vient bricoler les images avec sa petite caisse à outils.
C'est une recherche formelle très interessante, et c'est absolument faux de dire qu'elle n'a pas de fond. Ce travail de mise en scène très subtil et très maitrisé va racler bien profond, au fond du fond que personne n'a envie de regarder, avec des moyens (cadre, colorimétrie, ryhtme etc.) somme toute assez simples, mais parfaitement maitrisés. C'est dur d'expliquer ce que provoque ce film, c'est très viscéral, justement parce qu'on ne le voit pas, peut-être que l'on refuse de le regarder.
C'est ce que l'on reprochera à ce film au final, de ne pas sastifaire aux critères de divertissement/rire/amour/scenario/acteurs, d'avoir voulu être un long métrage ET une recherche formelle. Il aurait pas pu rester au musée avec les vidéos ce truc d'intello? On ne reprocherait rien de ce que l'on reproche à Post Tenebras Lux à une peinture. Comble de l'hypocrisie que de critiquer un travail direct sur ce que peut réveler la seule mise en scène dans un monde gouverné par les fringues et la photo de profil facebook…