Eprouvant. C'est le mot qui me vient pour qualifier le moment passé hier devant Pour Sama. Je me doutais que ce ne serait pas une partie de rigolade, vu le sujet, mais là...
Non seulement on a droit a des horreurs à limite de l'insoutenable, admettons-le puisque c'est la réalité. Mais le filmage ajoute à la nausée : que la caméra bouge lorsqu'il y a une alerte, on le comprend aisément. Dans la chambre avec la petite, ça se justifie moins. En étant un peu brutal, je dirais que Waad Al-Kateab ne sait pas filmer. Les seuls plans un peu stables et bien cadrés ont été faits par un drone... Edward Watts aurait dit que c'était une cadreuse exceptionnelle ? Franchement, je me pince. Tout comme lorsque je vois que ce film a été primé à Cannes.
Alors, il y a quelques belles séances, comme celle du bébé qui est réanimé. Et le film a le mérite de faire ressentir la différence entre les bombes larguées d'un hélicoptère qui, dans un plan d'ensemble, donnent un effet quasiment esthétique, et la réalité "en bas", vécue par les gens - on peut d'ailleurs se demander si les Russes auraient bombardé ainsi s'ils avaient pu voir ces images... Quelques personnages sont superbes, comme la voisine qui garde toujours le sourire, et ne pleurera que quand il faut quitter Alep. Le film n'est pas sans qualités non plus.
Mais le plus clair du temps, il joue trop la carte des images chocs ou larmoyantes. Le piège, c'est qu'on ne peut pas complètement le lui reprocher, puisque ce documentaire entend nous mettre face à la réalité de cette guerre. Il me semble toutefois qu'une approche moins frontale, plus cinématographique en fait, eût pu être tout aussi efficace. Et moins douloureuse pour le spectateur. La magie du cinéma c’est de suggérer plutôt que d’asséner, de stimuler l’imagination du spectateur plutôt que de lui balancer des scuds en pleine face. D’où mon impression de ne pas avoir affaire à une véritable cinéaste.
Un document nécessaire sûrement. Mais un grand film de cinéma ?
5,5