Portés par une BO indus du plus bel effet, les professeurs Banks (linguiste) et Donelly (physicien) avancent en slow-motion vers le parloir de plexiglas où ils vont s’entretenir pour la première fois avec les extraterrestres.


La scène est tellement belle et folle qu’on se surprend à retenir son souffle en prévision de l’instant tant attendu de la rencontre, comme si on accordait au cinéma notre confiance pour matérialiser l’objet de tous les fantasmes scientifiques, complotistes ou juste oniriques… Grand moment !


Au total, douze « coques » sont venues se poser de par le globe et fonctionnent toutes de la même manière. Chaque 18 heures, une trappe s’ouvre à leur extrémité inférieure et des terriens sont invités à entrer pour communiquer avec les « visiteurs ».


Le ton est aux antipodes de ce à quoi nous avait habitué le genre. Loin d’un Will Smith roulant des mécaniques sur fond de rap US, les scènes de Premier Contact semblent plutôt sorties d’un journal télévisé. On est finalement assez proche d’une ébauche d’anticipation très réaliste de ce que pourrait être la gestion d’une vraie crise extraterrestre mondiale avec ses enjeux administratifs, sécuritaires, médiatiques…


Et c’est d’ailleurs la grande beauté de ce film de science-fiction que de finalement paraître presque possible. Il lui suffit pour cela de simplement monter d’un cran dans notre conception actuelle des relations internationales afin de l’intégrer dans un cadre intergalactique.


Très logiquement d’ailleurs, les problématiques géopolitiques traditionnels refont immédiatement surface. Il s’agit d’équilibrer le droit et la puissance entre des USA classiquement désignés comme les sauveurs du monde et une alliance sino-russe plus que jamais menaçante. On notera toutefois que ce manichéisme agaçant s’efface élégamment en fin de métrage.


Exit, donc, le thème de l’invasion ou le scénario d’horreur ressassé. Postulant que, de toute façon, la technologie extraterrestre est supérieure aux moyens militaires humains, la dimension « guerre intergalactique » est clairement passée sous silence. Le focus est plutôt mis sur la question, beaucoup plus intéressante, de la recherche d’un langage commun, du moins d’un mode de communication.


Cette volonté d’interaction, qui constitue la clé du film, dépasse d’ailleurs la seule relation avec les « visiteurs » et englobe l’ensemble des acteurs internationaux. Premier contact semble vouloir signifier que le remède à la soif de chaos qui anime les hommes depuis toujours ne réside pas sur terre mais dans les cieux et dans les cœurs.


Par des alternances de plans (sublimes) entre les différentes « coques », et entre les diverses strates de pensée du personnage principal, le scénario dresse le portrait d’un monde enfin éligible à un changement radical de mode de fonctionnement. Et la clé pour ce faire résiderait dans une révolution d’ordre philosophique. Il s’agirait de questionner de front les concepts a priori de la raison kantienne : le temps et l’espace.


Remettre en questions nos certitudes, nous faire rêver par des mises en scène de haut niveau et des images frisant parfois le sublime (les plans aériens dans les nappes de nuage sont de toute beauté) et nous tenir en haleine jusqu’à un twist final de qualité, voilà le défi qu’a su relever le prodige Québécois pour son quatrième film, le classant d’emblée aux côtés du 2001 de Kubrick et de la saga mythique initiée par James Cameron.


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EliseGlupherbe
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le 2 janv. 2017

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