Dans Princes et Princesses, nous ne suivons pas des gens nobles en quête d'amour, mais bien un garçon et une fille, pauvres, qui vont au cinéma pour mettre en oeuvre leur créativité, et donc échapper à leur morose réalité. Dans ce lieu propice à la créativité, le vieil homme explique «Si vous voulez être prince et princesse, vous pouvez l’être autant que vous le voulez. Vous êtes loin d’en avoir utilisé toutes les possibilités». Et quoi de mieux pour un enfant, que de rêver à cette opportunité. Nos deux protagonistes se mettent donc en scène pour six courts contes en théâtre d'ombre, en 'princes' et 'princesses' sans noms, sans âges, sans nationalités pour une identification totale.
La Princesse des Diamants est un conte repris depuis toujours, où un maître abuse de sa force pour tuer des fourmis, petits insectes sans défense. Une malédiction s'abat sur lui et le transforme en cet être fragile qu'il aimait tant persécuter, alors que son gentil serviteur, lui, est un défenseur prêt à aider quiconque, est assistée par ces mêmes bestioles pour aider la princesse pour nous montrer que la gentillesse et être faible n'est pas un défaut dans ce monde.
La garçon des figues prend place en Égypte pour un conte millénaire traduit de hiéroglyphes où tout est respecté à la lettre, mis à part le pharaon devenu pharaonne pour que nos deux bambins puissent avoir un rôle. Un figuier produit miraculeusement des figues en mauvaise saison, alors cet imbécile décide d'offrir son fruit miraculeux à la pharaonne. Après lui avoir léché le cul comme il faut, la souveraine le récompense, et notre connard attire la jalousie de l'intendant dévoré d'ambition, qui porte une canne et une coiffe d'empereur, qui établira un complot. Le final sur le coupage de tête sera repris par Shakespeare, mais c'est sur ce conte antique qu'il est né. Être méchant, donc, c'est pas bien.
La Sorcière est une histoire originale du réalisateur, fatigué de la violence, sur une sorcière qui n'en est pas une. C'est une femme différente et autonome détestée de tous, et qui est la cible d'attentats pour cause de sa disparité. Un conte intéressant sur la tolérance, avec ce 'prince' ouvert à la communication pour un final étonnant bien intéressant.
Le Manteau de la Vieille Dame reprend un conte japonais du 12ème siècle, où une vieille dame, qui était à la base un moine, va subir une tentative de dépouillement, mais dont la force légendaire va changer la donne. En reprenant les dessins de Hokusaï, cette histoire est sans doute la plus charmante avec cette vieille femme qui profite de la situation pour sortir de son triste quotidien.
La reine cruelle et le montreur de fabulo reprend un des plus mauvais conte des frères Grimm. C'est dans un monde futuriste qu'une princesse décide de se marier, si elle ne trouve pas son prétendant à une partie de cache-cache mondiale. Tiré par les cheveux, et absolument ridicule, Michel Ocelot réussit une fois de plus l'adaptation comme il se doit, malgré ce conte à la morale bidon.
Quand au dernier conte Prince et Princesse, il prend à contre-pied tous les autres contes cuculs avec leurs mamours éternels. Le couple est déjà amoureux, fiancé, et ils délaissent les traditions pour un baiser pré-mariage. Ils se transforment successivement en animaux suite aux bisous, et ceci laisse place à l'instinct sexuel et animal. En effet, à mainte reprise l'homme devra grimper sur la femme pour atteindre sa bouche. Le conte original d'Ocelot met en cause la société avec le problème d'apparence, et ce final qui dit qu'on ne naît pas homme ou femme, mais qu'on le devient. Mais ça montre surtout que l'homme est bel et bien le sexe fort, car le femme est inculte, et ne sait pas qu'une mante religieuse mange son mari, et que la trompe de l'éléphant n'est pas sa bouche. La honte.
Avec des audaces visuelles, Michel Ocelot surprend petits et grands, avec ces simples contes, le cucul laisse place à la magie, et réveille la féerie en nous. Cette réalisation française a vraiment un charme fou, notamment avec ces belles musiques, malgré des contes pourtant bien lourds en particulier le futuriste à la morale à chier et aux nombreuses incohérences. Puis ces enfants qui s'imaginent des rôles, nous font bien comprendre qu'il faut rêver, qu'on peut devenir ce qu'on veut si on s'en donne les moyens.
Moi, j'veux bien être un prince. Et toi, veux-tu être ma princesse ? S'il te plaît. Allez, je fais super bien les crêpes en plus.