Découvert avec le suffocant Sicario (2015), confirmé avec le captivant Premier Contact (2016), puis l’énigmatique Enemy (2014), Denis Villeneuve fait partie des réalisateurs que je considère comme étant parmi les « valeurs sûres » aujourd’hui, outre-atlantique. Dans le but de continuer à le découvrir lui, et sa filmographie, Prisoners fut le suivant sur la liste.
Hugh Jackman et Jake Gyllenhaal, tous les deux en tête d’affiche d’un thriller américain. D’emblée, l’enthousiasme s’empare de nous lorsque nous découvrons la nouvelle. Mais, rapidement, le côté rationnel de notre esprit prend le dessus, nous rappelant que les productions hollywoodiennes à gros casting ont souvent eu tendance à nous décevoir ces dernières années. Alors, forcément, l’appréhension se saisit de nous, surtout qu’en 2013, Denis Villeneuve était encore un réalisateur peu connu. Ayant découvert Prisoners d’une manière plus rétrospective, mon approche fut différente, mais non moins sans attente.
Ce thriller glaçant nous immerge dans l’hiver froid d’une petite ville de Pennsylvanie, où deux petites filles vont être enlevées par un mystérieux individu. D’un côté, le père de l’une d’elles va prendre les devants en traquant les suspects, et de l’autre, un inspecteur va faire tout son possible pour résoudre l’enquête. C’est donc dans cette dynamique que se déroule l’histoire, avec l’opposition entre les deux personnages principaux, semblant tout d’abord construire un début de collaboration, avant d’être finalement menés à prendre des chemins différents au cours d’une enquête interminable et oppressante. Prisoners s’intéresse ici à l’exposition des différents points de vue de l’enquête, entre l’inspecteur intrigué, le père de famille à fleur de peau, et le suspect acculé et menacé.
Dans cette optique, le film parvient à mener un bon équilibre entre la succession des points de vue, et l’avancée de l’enquête, semant des indices tout du long, sans que parfois nous nous doutions de leur importance. Avec cette capacité à nourrir une atmosphère sombre, froide, obscure, voire malsaine, Denis Villeneuve parvient à saisir son spectateur et le pousser à chercher à mettre à jour la vérité. Comment ne pas comprendre la perte de raison du père ? Comment ne pas comprendre le désarroi de l’inspecteur, ne pouvant que comprendre les réactions du père, mais devant agir dans le cadre de la loi ? Comment ne pas avoir un drôle de mélange de haine et de pitié pour Alex, suspect idéal ? Finalement, tous ces individus sont bel et bien prisonniers d’une situation qui les dépasse, prisonniers de leurs propres émotions et ressentiments, prisonniers d’un engrenage catastrophique qui modifiera à jamais le cours de leur vie.
Prisoners reste un thriller tout à fait classique sur la forme, très hollywoodien, parfois presque un peu gros. Mais sa qualité est indubitable, tant du côté de la réalisation, parvenant à entretenir un suspense insoutenable et à parfaitement rythmer son intrigue, que du côté des acteurs, qui parviennent tous à exceller, Hugh Jackman, Jake Gyllenhaal et Paul Dano en tête. Les amateurs du genre en ont pour leur compte, et ce film me prouve une nouvelle fois que Denis Villeneuve est un réalisateur de grande qualité, dont il me tarde de découvrir le prochain film, Blade Runner 2049, après avoir terminé sa filmographie.