Des hommes et des ingénieurs.
En 2089 sur l'île de Skye, en Ecosse, une équipe d'archéologues trouve une peinture présumée vieille de plus de 30 000 ans. Quand ils se rendent compte qu'elle représente le même symbole que six autres peintures similaires de différentes civilisations, ils décident d'organiser une expédition vers la destination qui leur est indiquée par ces oeuvres...
Il y a énormément de choses à dire sur "Prometheus", film attendu comme le messie de la SF, réalisé par le grand Ridley Scott. Qu'en est-il donc ? Et bien, le résultat est une oeuvre foisonnante, absolument passionnante, d'une richesse incroyable et comparable à celle d'un "Star Wars". Ridley Scott a concentré dans son film toute la mythologie de la saga "Alien" pour en construire ses origines, sa genèse.
Mais surtout, Ridley Scott avec "Prometheus" ne fait pas que réaliser un simple film : il comble l'imagination que l'on pouvait avoir au sein de cette saga, et il le fait d'une façon magistrale. Mais le vrai exploit qu'a accompli Scott, c'est de faire de "Prometheus" l'un des rares derniers films de cette dernière décennie une oeuvre qui ne vaut avant tout pas sur sa qualité formelle, mais sur son fond, pur et dur. Car au-delà de la réalisation, parfaite, évoluant dans un monde cinématographique magnifique, le cinéaste ose tout ce que n'aurait jamais osé un simple réalisateur autre que lui. Et Scott n'a pas froid aux yeux : à défaut de plaire à toutes les religions, "Prometheus" va chercher jusqu'aux origines de la vie, de la terre, de l'homme. Il a va jusqu'à donner un visage à ce que nous appelons Dieu, va jusqu'à bâtir l'origine de l'origine. Le seul cinéaste qui avait franchement osé s'attaquer au système et à la société d'une façon si puissante était David Fincher, avec son "Fight Club". Ridley Scott, sur fond de SF, démontre une vision très personnelle de la chose et imagine les origines de l'univers à sa façon, tout en se permettant de l'introduire dans une saga qu'il avait initié en 1979.
Alors certes d'un point de vue purement cinématographique, le film ne provoque plus l'effroi ni de réelles nouveautés concernant le déballage du scénario.
Mais si l'on regarde en détail la mythologie de la fameuse saga, "Prometheus" répond enfin à quelques unes des questions illustrées dans la tétralogie. Mais encore plus fort, Scott pose de nouveau de nouvelles questions, qui s'avèrent encore plus passionnantes que les réponses. Le bilan est bordélique mais jouissif de contenu : nous savons désormais qui sont les Space Jockey, nous savons d'où provient le xénomorphe (bien qu'il semble que sa conception soit bien plus compliquée qu'il n'y paraît, presque inexpliquée en un seul film) et l'alien apparaissant à la fin du film est-il vraiment une reine, ce qui expliquerait la présence des oeufs dans le vaisseau au début du premier "Alien" à moins que je ne me trompe totalement) ? On se dit que la saga est complétée à défaut d'avoir eu toutes les réponses plus ou moins primordiales. Mais de nouvelles questions se profilent : pourquoi les Ingénieurs voulaient-ils détruire la vie sur Terre après l'avoir créé ? Est-ce leurs expériences nous étant destinées qui les ont tué avant de devenir ce que l'on sait à la fin du film ? Le professeur Shaw et l'androïde David vont-ils réussir à trouver d'où viennent ces créateurs et découvrir le comment du pourquoi ?
En même temps qu'une saga s'achève presque par le commencement, une autre parallèle débute avec Noomi Rapace comme nouvelle héroïne. Et pourtant il va falloir s'y faire, un "Prometheus 2" ne peut être que déjà prévu, car nous ne savons toujours pas comment le vaisseau du premier "Alien" a atterri sur la planète sur laquelle le Nostromo s'est posé, ni comment le xénomorphe a bien pu s'introduire dans les Space Jockeys ayant visiblement réussi à quitter la planète de ce film. Trop de choses restent à éclaircir en même temps que de nouvelles pistes se présentent à nous.
Sir Ridley Scott, votre film n'est peut-être pas parfait mais vous avez osé un incroyable nombre de choses touchant à tous les domaines, de la religion au mystique en passant par la science du corps et la soif du pouvoir, en environ deux heures. "Prometheus" est votre meilleur film depuis "Gladiator", et le meilleur film de SF depuis... "Les Fils de l'Homme ? Un grand bravo.
Et tan pis si mes conclusions s'avèrent fausses et si tout ce que j'ai pu voir n'est qu'une partie d'un puzzle, car là est tout l'intérêt et toute la maestria du film, dans ses fausses pistes et ses suppositions, et jamais dans tout le film Scott et Lindelof ne nous imposent leurs visions, c'est nous qui continuons d'imaginer le film après l'avoir vu. Un véritable bonheur de cinéphile et de cinéphage, pour un film qui mérite obligatoirement un investissement de notre imagination et de notre propre univers afin de fusionner avec cette histoire et ce monde spatial hors du commun.