Tout accuse Martineau du meurtre du vieux et libidineux Brignon: sa jalousie à l'égard de sa femme -légère il est vrai- les menaces proférées à Brignon juste avant la mort brutale de celui-ci et surtout sa présence sur les lieux du crime.
"Quai des orfèvres" est un drame criminel sombre, conforme à la vision sociale de son auteur et à la noirceur qu'il prête à l'âme humaine. A l'arrivée -tardive- de l'inspecteur de police Antoine, Clouzot semble d'ailleurs affirmer que nul n'est mieux placé qu'un policier pour assister au triste spectacle des turpitudes humaines. De fait, l'enquête que mène Antoine (Louis Jouvet), vieux de la vieille désabusé, stigmatise les mensonges autant que les rapports sociaux brutaux. Ainsi rencontre-t-on, dans cette intrigue policière dont la nature de l'énigme n'est pas l'argument le plus déterminant, des personnages qui dépasse le cadre strict du cinéma policier de l'époque: le vicieux Brignon (Dullin), Dora, la bonne "amie" de Madame Martineau et d'autres, parmi lesquels l'assassin présumé, le trop tendre Martineau (superbement interprété par Bernard Blier), fait figure de victime expiatoire d'une humanité sordide.
Cependant , le film ne reflète pas complètement la noirceur que revendique Clouzot. En effet, l'ironie et les sentences malicieuses, et même la bienveillance, du bourru inspecteur Antoine -admirable Jouvet- introduisent de savoureuses scènes d'humour à froid.