Légère déception avec ce Quarante tueurs, western de 1957 signé Samuel Fuller, l’auteur notamment de Shock Corridor et Dressé pour tuer.
En effet, après la très bonne scène d’introduction où un charriot de voyageurs est malmené par un flot sans discontinuer de cavaliers lancés au galop – la bande des quarante tueurs présume-t-on –, j’ai trouvé l’histoire assez confuse et brouillonne. Sans doute à cause de certaines ellipses scénaristiques, ou bien à cause du fait que le film ne nous donne pas vraiment les clés pour comprendre les tenants et les aboutissants de l’intrigue. Ou alors j’étais juste vraiment trop fatigué, mais je ne crois pas que ma compréhension de ce western aurait été aussi embrouillée.
Précisons : quand je parle de manque de clés de compréhension, je pense que ce qui m’a le plus dérangé, c’est le manque de caractérisation des personnages. Ils sont nombreux, et il est difficile d’identifier qui ils sont et quelle est leur fonction.
La bande des 40 voleurs – ça fait très Ali Baba ! – que l’on présume méchants en raison du titre, disparaît rapidement de l’intrigue. La femme charismatique qui est à leur tête, la « Patronne » Jessica Drummond interprétée par Barbara Stanwyck, n’est finalement pas véritablement hors-la-loi, mais plutôt une riche et puissante notable, qui fait tomber en admiration tous les hommes qu’elle rencontre.
A force de déductions, on comprend qu’elle règne d’une main de fer sur Tombstone (la ville westernienne par excellence, bien connue pour son célèbre gunfight dans l’excellent Règlement de compte à OK Corral) grâce au soutien de ses quarantaine d’hommes de main.
L’arrivée en ville d’un nouveau shérif, Grieff Bonnel sous les traits de Barry Sullivan, et de son petit frère Wes (Gene Barry) va changer la donne et l’ordre établi.
Beaucoup décrié par les spectateurs et les critiques, et élément supplémentaire participant au caractère brouillon de l’histoire, le happy end final est plutôt mal venu et tombe comme un cheveu sur la soupe. Pour la défense du réalisateur, cette fin heureuse fut imposée à Samuel Fuller par les producteurs et les distributeurs, preuve que les réalisateurs hollywoodiens n’ont (et ce encore aujourd’hui) que rarement carte blanche sur leurs films.
Si j’ai assez vite décroché du scénario, la forme m’a en revanche intrigué et a capté mon attention.
La photographie, dans un scope en noir et blanc très contrasté, est vraiment magnifique. La mise-en-scène est également assez somptueuse et donne aux personnages des airs patibulaires plutôt réjouissants. Fuller possède un sens du cadrage et du rythme qui donne au film un côté enivrant. Certains plans ont de quoi marquer les esprits : le visage de la belle armurière qui se dessine en rond au bout d’un canon de fusil (impossible de nos jours de ne pas penser au générique de James Bond ou, référence plus Nouvelle Vague, à A bout de souffle) pour déboucher sur un langoureux baiser ; le plan serré sur les yeux perçants du shérif Griff en plein duel (là, c’est évidemment à Sergio Leone que l’on pense) ; ou encore le long travelling qui suit les protagonistes avançant dans la rue principale et poussiéreuse de Tombstone.
J’ai également été positivement étonné par les trois séquences de comédie musicale qui, dans un western, ont de quoi surprendre. Les chansons, en particulier celle aux accents country centrée sur la sensualité du personnage de Jessica Drumond, sont très réussies.
Malgré quelques plans et cadrages assez novateurs, je doute de garder ce Quarante tueurs bien longtemps en mémoire. La faute principalement à son scénario alambiqué et décousu.