Quelque part dans la nuit par Gauvain
Ce polar n'a rien de révolutionnaire, et se contente de tirer le meilleur parti possible des codes du genre. Mais c'est déjà pas mal ! Combinant astucieusement intrigue policière et exploration psychologique pas si superficielle que ça (je pense à toutes les interrogations sur le thème de l'identité et du passé, mais aussi à l'émouvante scène avec la vieille Elisabeth (Josephine Hutchinson) sur la solitude), le film est agréablement rythmé, sans temps mort et sans précipitation, et ménage talentueusement une "montée en puissance" dans l'intensité, le suspense et la tension. Il ne faut pas trop chercher de vraisemblance dans l'enchaînement des actions (il y a un côté un peu "jeu vidéo" dans la manière dont Georges Taylor (John Hodiak) passe d'un indice à l'autre de façon linéaire et presque sans aucun obstacle), mais le moins que l'on puisse dire, c'est que l'ensemble se laisse très agréablement regarder et qu'on est complètement pris par le film. Certaines scènes sont remarquablement bien filmées (la scène d'"infiltration" dans l'hôpital psychiatrique est délicieusement angoissante), et j'accorde une mention spéciale à la prestation de Fritz Kortner dans le rôle du grand méchant Anzelmo. Ni le manichéisme de l'ensemble, ni les clichés nombreux ne méritent d'être considérés comme des éléments à charge : le film se contente d'atteindre l'excellence dans la conformité à son concept, sans prétendre aller au-delà ; on regrettera peut-être quand même une tendance un peu déstabilisante à enchaîner les retournements de situation vers la fin : on s'y perd un peu, et ce n'était pas forcément utile.