Pour avoir vu quelques films de Stéphane Brizé, je commence à y cerner des constantes : le souci du réalisme, la justesse parfaite des acteurs, des sentiments exprimés avec une délicatesse rare.
Quelques heures de printemps nous propose d'assister au face-à-face entre une mère et son fils. Hélène Vincent est tellement admirable dans ce rôle, dans la peau de cette petite femme très digne qui semble avoir mené une vie pas très drôle mais toujours avec droiture - elle m'a énormément touchée. Elle semble avoir du mal à accepter que son fils soit passé par la case prison (même si ce ne fut que pour peu de temps et pour un délit mineur).
Stéphane Brizé sait rendre comme personne ces repas mutiques entre ces deux êtres orgueilleux qui ne savent pas comment se dire leur amour. Le chien de la famille fait bien office de trait d'union entre eux mais le ressentiment est tangible de part et d'autre. Il se sent infantilisé par ce retour dans le giron maternel, honteux de ne pouvoir s'assumer à 48 ans; elle ne supporte pas ses réactions sanguines qui lui rappellent feu son mari. Ainsi vont les choses entre eux, et les silences masquent mal la colère qui sourd partout. Et pourtant, par de menus, d'infimes détails, on sent bien qu'aucun n'est véritablement indifférent à l'autre, bien entendu.
Il faudra attendre que la mort rôde assez près pour qu'enfin cède la glace, que les mains se prennent, que les mots disent in extremis l'inconditionnelle affection.
Impossible, pour un être humain mortel doué de sensibilité, de ne pas fondre en larmes devant cette tragédie de la vie, narrée avec tant de pudeur, de douceur et de sincérité. Ce fut pour moi un vrai bouleversement.
Impossible ici de ne pas penser à ceux qui nous sont chers et qu'un jour nous devrons bien quitter, quel que soit l'ordre des départs. Quand l'heure sera venue du grand saut, qu'aurons-nous envie de dire et à qui ? Pourrons-nous affirmer que nous aurons eu "une belle vie", ainsi qu'est posée la question dans ce film ?
Ce film n'a en fait qu'un seul message à passer : n'attendons pas. N'attendons pas de ne plus pouvoir attendre. Avouons notre amour à ceux que nous aimons, tant qu'il reste du temps.
La vie est courte et ô combien tragique mais, comme le suggère le titre, elle nous laissera sans doute quelques heures de printemps - assez pour dire je t'aime aux frères humains de notre coeur.