Injustement oublié et boudé, Quelques messieurs trop tranquilles est pourtant une belle et bonne comédie du cinéma français des années 70. Certes, avec son style aujourd’hui un peu daté, ses comédiens trop connotés dans le comique bas de gamme, ses clichés éculés, son scénario mince comme du papier à cigarette, le film véhicule une image qui fleure bon le nanar mais attention, ici il y a erreur : on est bien dans du vrai cinéma.

Il faut balayer immédiatement plusieurs idées reçues : non, Galabru, Lefebvre, Préboist ou Guybet, ne sont pas de mauvais acteurs comme une certaine presse bien pensante a eu par le passé (et encore aujourd’hui) tendance à le croire et à le marteler. Authentiques comédiens, capables certes du pire (On n’est pas sorti de l’auberge, le plumard en folie, autant de parfaits exemples de ce qu’il NE faut surtout PAS faire dans une carrière) ils sont surtout capables du meilleur (Les tontons flingueurs pour Lefebvre, Le juge et l’assassin pour Galabru, Canicule pour Guybet) et nous offre ici une très jolie prestation. Les autres comédiens ne s’en sortent pas trop mal pour la plupart (Préboist m’a fait beaucoup rire, André Pousse aussi) mais reconnaissons que les hippies sont par moment assez ridicules. Trop typés, trop emprunts de clichés, certains jouent clairement mal et heureusement que les autres sont là pour leur donner la réplique.

Lautner sait diriger ses principaux comédiens et s’amuse avec eux dans une comédie policière haute en couleur, où un tranquille petit village en fin de vie, voit débarquer une bande de hippies qui vont troubler la quiétude des lieux et les habitudes de nos villageois engoncés dans leurs préjugés. S’adaptant finalement à leur présence, les petits bourgeois locaux tentent de coexister pacifiquement avec les trouble-fêtes. Mais lorsqu’un meurtre est commis, ils n’hésiteront pas à dénoncer les hippies avant que le remord ne les rattrape.

Occasion pour Lautner de présenter ces fameux hippies (vivant d’amour et d’eau fraîche, d’union libre et de drogue douce), ces Quelques messieurs trop tranquilles, s’ils voient d’un mauvais œil leur arrivée, n’hésitent pas à reluquer d’un tout autre œil (plus concupiscent celui-là) les corps joliment dénudées des hippies de sexe féminin (amusant de remarquer que Miou-Miou, pourtant habitué à nous dévoiler son anatomie, reste curieusement pudique dans cette histoire). Beaucoup de filles dévêtues dans ce film, où la libération sexuelle est toute récente et qui fournit au film un beau prétexte à un peu de nudité. Nos messieurs en profitent bien, mais le film ne vire pas au vulgaire pour autant. Enfin… Pas trop. Il offre même de très joyeuses scènes (Galabru en mode « drague » façon « Tarzan » est jouissif), de la tendresse (les relations entre Lefebvre et Miou-Miou), un rien de suspens (mais qui a tué le majordome !) et même des cascades (une épique course poursuite en voiture ou comment démembrer un véhicule pièce par pièce tout en continuant à conduire). Ces dernières séquences, pour réussies soient-elles, s’intègrent cependant mal dans une histoire où elles n’ont pas lieu d’être.

La fusillade finale se veut sans doute un écho à celles des Tontons mais l’inspiration n’est pas la même, c’est plus lourd, c’est plus long, en gros c’est moins bien. Mais le gag final dans le dernier plan du film (avec un Lefebvre en bouddhiste) vaut le détour et sauve le film d’un ratage final qui lui aurait dommageable d’autant plus que la première heure est très bonne (l’instituteur Galabru devenu allergique aux enfants, Guybet explorant un tombeau et se faisant peur avec Lefebvre, etc). Oscillant sans doute un peu trop entre comédie fine et grosse rigolade, le film se perd un peu dans son histoire policière (qui survient trop tard pour qu’on s’y intéresse vraiment et dont l’enjeu ne nous apparaît pas capital) et aurait sans doute gagné à une meilleure construction et plus de cohérence. Mais Quelques messieurs trop tranquilles est avant tout un exemple typique d’un certain cinéma français des années 70, et réussi qui plus est. Avec ses défauts, il reste tout à fait regardable (contrairement à d’autres métrages de l’époque) et possède un charme désuet tout à fait plaisant, auquel l’amusement manifeste des comédiens n’est pas étranger.
Shok_Nar
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le 27 août 2013

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Shok Nar

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