Lettre ouverte
Papy, J'aurais tant aimé voir ce film en ta compagnie. Voir De Niro, exposant son art, évoluer dans le monde de la boxe, ce monde d'hommes misogynes au possible où la virilité est de mise. Observer...
Par
le 24 mai 2013
124 j'aime
22
La mythique collaboration Scorsese/De Niro : une époque incroyable désormais révolue, mais dans laquelle il est toujours captivant de se replonger parfois. Pourtant, « Raging Bull » n'est pas celle que je préfère, et ce pour plusieurs raisons. Même si cela est évidemment volontaire, le film reste très froid, parvenant difficilement à créer l'émotion et encore moins l'empathie pour un héros à la personnalité terriblement nocive, détruisant quasiment tous ceux qui s'approchent de lui, et ce aussi bien physiquement que psychologiquement. De plus, l'ami Marty a comme souvent tendant à abuser des scènes un peu longues, notamment en ce qui concerne parfois les dialogues.
Cela écrit, difficile de passer à côté des qualités majeures du spectacle : la maîtrise de Scorsese est implacable, que ce soit par le choix d'un noir et blanc crépusculaire, évoquant aussi bien l'âge d'or d'Hollywood qu'une sécheresse très personnelle, agrémenté de quelques scènes monumentales et du cultissime
"You fuck my wife"
, véritable point culminant d'une œuvre ne manquant pourtant pas de moments marquants, à l'image dont l'auteur des « Affranchis » filme les scènes de boxe, courtes et brutales, parfois d'une violence assourdissante.
Et Jake LaMotta a beau être un mec quasiment indéfendable, la façon de le filmer, de le présenter comme une figure quasi-sacrificielle, masochiste et souvent insaisissable donne à l'œuvre quelque chose d'unique, surtout interprétée par un Robert De Niro plus « Actor's studio » que jamais, impressionnant même s'il serait injuste de ne pas évoquer Joe Pesci, presque aussi exceptionnel dans un tout autre registre. Bref, un biopic ne ressemblant à aucun autre, et si le sommet de la collaboration entre les deux monstres restera pour moi l'immense « Taxi Driver », difficile d'ignorer ce « Raging Bull » qui, malgré la légère déception, n'en demeure pas moins un incontournable.
PS : en relisant ma critique et après un troisième visionnage, je n'ai pas forcément des centaines de choses à modifier ou ajouter, si ce n'est que les scènes trop « longues » m'ont moins gêné que précédemment. Il y a effectivement un côté très « sado-maso », insaisissable chez ce personnage pour le moins ambigu (euphémisme), que Martin Scorsese filme avec une puissance, une précision impressionnante, Robert De Niro se donnant littéralement corps et âme pour incarner plus qu'un rôle : un véritable corps de cinéma.
À travers ce portrait complexe, le cinéaste saisit aussi une époque, un monde, très masculin, très auto-centré voire violent, n'empêchant pas une forme de « tendresse » passagère (fort virile, faut-il le préciser), dépassant largement le cadre simpliste du film de boxe, les scènes concernées, aussi impressionnantes soient-elles, se révélant finalement très minoritaires.
« Raging Bull » est souvent considéré comme LE chef-d'œuvre de sa décennie (laquelle, d'ailleurs, vu qu'il est sorti en 1980) : je ne saurais dire, mais ce nouveau visionnage sur grand écran confirme l'ampleur et l'importance d'une œuvre ayant autant marqué son temps que le septième art.
Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Les meilleurs films avec Robert de Niro, Les meilleurs films de Martin Scorsese, Les meilleurs biopics, Les meilleurs films de 1981 et Les meilleurs films des années 1980
Créée
le 4 mars 2018
Critique lue 197 fois
4 j'aime
D'autres avis sur Raging Bull
Papy, J'aurais tant aimé voir ce film en ta compagnie. Voir De Niro, exposant son art, évoluer dans le monde de la boxe, ce monde d'hommes misogynes au possible où la virilité est de mise. Observer...
Par
le 24 mai 2013
124 j'aime
22
Au loin, sur un carré immaculé, un homme en robe de chambre à capuchon sautille au son d'une capricieuse mélodie ancienne. En noir et blanc. Aussi libre et léger que le papillon, aussi dur et...
Par
le 18 mars 2016
91 j'aime
23
[série : SanFelice révise ses classiques, volume 1 : http://www.senscritique.com/liste/San_Felice_revise_ses_classiques/504379] Je n'aime pas les biopics. Sauf exceptions, bien sûr, mais qui sont...
Par
le 22 juin 2014
76 j'aime
8
Du même critique
Thierry de Peretti est un réalisateur doté d'une bonne réputation, notamment grâce à « Une vie violente », particulièrement apprécié à sa sortie. J'y allais donc plutôt confiant, d'autant que le...
Par
le 20 août 2022
32 j'aime
8
Cinq ans d'attente, avant que la crise sanitaire prolonge d'une nouvelle année et demie la sortie de ce 25ème opus, accentuant une attente déjà immense due, bien sûr, à la dernière de Daniel Craig...
Par
le 7 nov. 2021
29 j'aime
31
Je le sentais bien, pourtant. Même si je n'avais pas aimé « Momo », adapté du même Sébastien Thiéry, cela avait l'air à la fois provocateur et percutant, graveleux et incisif, original et décalé,...
Par
le 25 sept. 2021
23 j'aime