Il faudrait inventer un genre "Film avec Matt Damon". Ce sont toujours des films qui explorent les travers de l'empire américain sans vraiment en remettre en cause les fondements. Des films qui dénoncent sans proposer autre chose, et qui par leur critique au fonds, font partie du système. Pas de mauvais films.
Ma critique est-elle pertinente ? Je ne sais même pas.
Je n'ai pas détesté ce film, en général j'aime les films d'espionnage, surtout s'ils sont capables de retranscrire ce que cette activité a de fascinant : le fait de perdre toute notion de confiance et de foi dans la réalité ou l'être humain. Et c'est le sujet central de ce (long) film de 2 h 30.
On suit le parcours d'un personnage dont la carrière épouse les transformations de la CIA, de son embryon de service de renseignement militaire pendant la Seconde Guerre mondiale à son véritable essor dans la guerre froide. C'est un peu un abrégé de la (bonne) série The Company.
Avec De Niro à la fois dans un rôle marquant et à la réalisation (ce qui explique peut-être l'apparition étrange de Joe Pesci). Le récit est très construit, mais repose un peu trop sur des fusils de Tchekov (c'est assez ironique que l'on nous assène une représentation de La cerisaie).
Le film fonctionne, il sait raconter une histoire et le trouble des personnages sans être bavard, mais il n'a pas une grande finesse non plus. C'est très démonstratif. Originalité, un discours assez anti-WASP, qui montre le monde des services secrets comme un petit monde fermé restreint à une élite blanche protestante. Original, mais pas très finement amené.
Quelques seconds rôles marquants (le fils !), et une Angelina Jolie de très bonne composition en épouse alcoolique et dépressive.
Raisons d'Etat (le titre français est vraiment passe-partout) est un film bien huilé sur les services secrets, mais dont les amoureux du cinéma verront un peu trop les ficelles.
Synopsis.
1961. L'échec de la baie des cochons. Edward Wilson, le principal agent en charge, a peur pour sa carrière.
Flashback, il revient à la fin des années 1930. Son intégration dans la société Skulls and Bones. La première fois qu'il a croisé le FBI, lui demandant d'espionner son prof de littérature crypto-nazi. Son béguin pour Laura, une sourde de naissance, tué dans l'oeuf car il a engrossé la soeur d'un ami. L'annonce de la déclaration de la guerre en Europe. Le général Sullivan (De Niro), qui lui demande de rejoindre l'embryon du premier service secret américain. Ses premières armes dans l'Angleterre du Blitz, à essayer de rattraper l'expérience anglaise dans l'industrie du secret. Berlin à la Libération, les savants nazis que l'on s'échange comme des cartes Pokémons avec les Russes.
1949. Sullivan revient, annonce la création de la CIA, propose des responsabilités au sein de ses opérations de déstabilisation.
Retour au présent. On cherche une taupe dans le service. A Cuba, des avions américains aspergent les plantations de crickets. La taupe est le supérieur d'Edward, Philip, qu'il connaît depuis 20 ans.
Retour aux années 1950. Evaluation de Mironov, un transfuge qui prétend connaître Ulysse, nom de code d'un ponte du KGB équivalent d'Edward. Edward recroise Laura. Un autre Mironov se présente : difficile de savoir lequel dit vrai. Le fils, Edward Jr, entre dans les services secrets.
Retour au présent. La bande montrant le traître qui a livré l'emplacement de la baie des Cochons aux Russes a été localisée. Edward trouve l'hôtel au Congo. Un Russe l'attend, lui joue une bande : Edward a été trahi par son propre fils. Les Russes tentent de le recruter. Il refuse, mais rien ne semble définitif. La CIA grossit. Il n'y a pas vraiment de fin, le personnage d'Edward semble de plus en plus déshumanisé.