A l'origine le sujet de Daphné du Maurier ne semble pas se démarquer des principes élémentaires d'une certaine littérature féminine. C'est tout le mérite d'Hitchcock, dans un style déjà bien identifiable, que d'avoir associé au romantisme initial du sujet une noirceur et une esthétique pleines de mystère. "Rebecca" est même un des films les plus représentatifs de l'oeuvre d'Hitchcock, en ce sens où la défunte Rebecca permet au cinéaste de développer successivement un drame psychologique puis une pure intrigue policière.
Tel que dans un conte de fée (quoique le ton du film soit déjà désenchanté), la jolie Jane rencontre et épouse à Monte-Carlo le riche et séduisant veuf de Rebecca, lequel vit, comme la domesticité, dans le culte de la disparue.
Jusqu'à un certain et inattendu rebondissement, coup de théâtre assez décevant parce qu'il initie une intrigue superficielle, Jane doit tenter d'exister en dépit de ce fantôme obsédant qui semble hanter la demeure de Manderley, au risque de sombrer.
Hitchcock joue avec les ombres et les physionomies inquiétantes de quelques uns. Mais, à l'image de l'interprétation de Joan Fontaine, la mise en scène (de son premier film hollywoodien) n'est pas sans emphase, et c'est là sa faiblesse. On ne retrouvera guère la légèreté et l'humour du cinéaste que dans ses allusions aux moeurs de la sévère gouvernante!