Réparer les vivants est une déception. Le film fait état de l'incapacité du cinéma indépendant à quitter le chemin balisé des effets arty de mise en scène: ici on a des travellings à tout va, des plans séquences à n'en plus finir et des effets de ralentis plutôt grossiers. Ce troisième film donne le constat d'un déjà vu ou du moins il remplit complètement nos attentes, ce qui n'est guère mieux. Proposant pourtant un scénario original, le film ne cesse de garder le spectateur dans sa zone de confort, déroulant son mécanisme minutieux sous les yeux faussement ébahis du public, soit à demi fasciné par ces belles images, ou à demi endormi sur son fauteuil, comme ce fut mon cas. A ce programme sans sursaut s'ajoute des effets de pathos des plus malvenus. Le piano vient souligner de façon constante chaque point sensible du récit, frôlant à chaque moment au pire le grotesque, au mieux l'indifférence. Une fois encore, les flash-back façon clip (que l'on retrouve aussi dans Juste la fin du monde) me rendent assez dubitatif. Comme ce film n'est pas non plus un total naufrage, soulignons ces points positifs. Tout d'abord, il a un casting très convaincant, on a rarement vu Tahar Rahim aussi touchant, sortant de sa palette habituelle de jeu; de même que Anne Dorval compose son personnage tout en retenu et sous entendus. La scène de l'accident, inévitable, est traitée de façon sobre et extrêmement poétique. Que manque t-il finalement à ce film? Une bonne dose de folie, de prise de risque, il lui faut sortir de ses images un peu trop léchées, de ses gimmicks de mise en scène trop communs aux films d'aujourd'hui, alors le film pourra à défaut de réparer le cinéma français, du moins proposer au spectateur une expérience de cinéma, et non pas le visionnage d'un film parmi tant d'autres.