Dans la vallée de l'Arve,en Haute-Savoie,une usine de décolletage,mécanique de précision travaillant des pièces destinées principalement au secteur automobile,est sur le point d'être rachetée par un fonds de pension britannique,ce qui implique comme d'hab plan de restructuration et licenciements massifs.Cédric,employé de longue date de l'entreprise,décide alors de créer avec ses potes Denis,un petit entrepreneur,et Alain,employé de banque,son propre fonds d'investissement afin d'acquérir la boîte incognito.Commence la course à l'argent et les tracas administratifs.Le pedigree de Gilles Perret,réalisateur et coscénariste du film,a de quoi rebuter de prime abord.Le gars est le bon gros gaucho de base issu d'un milieu ouvrier et délirant sur le Grand Soir qui a livré une tapée de documentaires militants avec en point d'orgue un doc sur Mélenchon,le Grand Timonier en personne.Pourtant cette première incursion dans la fiction est plutôt équilibrée et maîtrisée,s'attaquant judicieusement aux ravages de l'ultra-capitalisme mondialisé et à la destruction du tissu industriel français et européen.Il choisit la voie de l'intimisme,pas de manifs gueulardes ou d'occupations d'usines ici,pour décrire de l'intérieur les mécanismes à l'oeuvre dans ce système et le combat clandestin mené par une poignée de résistants.Du coup ce n'est pas spectaculaire,on est sur de l'esthétique et du rythme téléfilm,mais la démonstration est efficace et éclairante.Cette piste de la lutte utilisant les moyens de l'adversaire pour les retourner à son avantage,comme dans les arts martiaux,est assez utopique mais permet une plongée en profondeur dans un écosystème mal en point.On voit que tout le monde a ses raisons et que les dissensions peuvent surgir de partout.Les grands groupes financiers veulent faire du fric,normal c'est leur vocation,et se tirent la bourre entre eux car la concurrence les touche aussi.Quant aux Robins de la vallée,ils se disputent à l'occasion et doivent affronter le scepticisme ambiant,notamment celui de leurs familles et des collègues.Le directeur de l'usine est sous pression et picole,la jeune cadre dynamique est prise entre deux feux,celui de ses amis d'enfance qu'elle aiderait bien et celui de l'entreprise qui lui offre une promotion royale,l'héritière de la boîte ne veut plus s'en mêler,trop de problèmes,et le juvénile agent financier qui conseille les redresseurs de torts joue double jeu car business is business.Même les ouvriers sont divisés entre ceux qui entrent en résistance,ceux qui espèrent ne pas être dans la charrette et ceux qui se contenteraient d'une grosse prime pour rebondir ailleurs.On le voit,rien n'est simple pour personne et si Perret choisit une conclusion optimiste,on sait que ces histoires se terminent rarement aussi bien.Curieusement le film bénéficie d'un casting bourré de valeurs montantes à la mode,ces acteurs ont dû baisser leurs tarifs pour faire acte de militantisme concerné.Il y a Pierre Deladonchamps,Grégory Montel,Laetitia Dosch et Finnegan Oldfield,qui sont tous bien mais sans plus,tout ça est un peu pâlichon et manque de personnalité.Les seconds couteaux sont aussi très cotés avec Vincent Deniard,Samuel Churin,Marie Denarnaud et Yannick Choirat.On voit apparaître en prime deux vieilles figures tutélaires de la gauche showbiz,Jacques Bonnaffé et l'increvable Rufus.