L'histoire incroyable du Mime Marceau, du temps où il était Marcel Mangel...le résistant au service des enfants juifs. En cette avant-première au Festival de Deauville, à la lecture du catalogue et aux bribes du script que nous distillent les acteurs (présents), l'on est plus qu'intéressés, on ne tient plus en place sur son fauteuil en attendant de découvrir ce qui promet d'être une épopée tragique. Et lorsque la lumière baisse et que le silence se fait, l'on comprend vite avec l'ouverture que l'on ne nous a pas menti : Resistance est bel et bien une plongée déchirante dans les horreurs de la guerre à hauteur d'enfants. Ils ont à peine six ans, peut-être neuf, mais dans leurs yeux, ils en paraissent quatre-vingt, épuisés d'une vie qu'ils n'ont pas vécu par les atrocités qu'ils ont vu. Marcel Marceau, qui ne voulait pas, au départ, rejoindre la résistance, a vite succombé (en même temps que nous) au regard effroyable de ces gamins, et décide de les aider en faisant le pitre, les plus belles scènes du film. Bien entendu, n'attendez pas un film réaliste, de nombreux éléments sont romancés (nous avons appris en dialoguant avec Clémence Poesy que son personnage était totalement inventé, par exemple), ce qui fera râler les puristes ou encore ceux qui feraient mieux de zapper sur les docs d'Arte (s'ils veulent vraiment voir un documentaire en bonne et due forme)... Surtout que le film fait l'effort d'inclure une scène qui nous indique, dès après l'ouverture, qu'il s'agit d'une histoire racontée par un soldat, avec ce que cela implique comme "déformation du conte", comme un indice au spectateur qu'il est devant une semi-fiction. Mais parmi les scènes que l'on sent clairement ajoutées pour le côté spectaculaire, on ne peut pas dire que l'on est déçu, on retient son souffle lorsque


Klaus Barbie frôle la cachette d'Emma dans le train, que les balles fusent aux oreilles des enfants, ou que les femmes attendent la mort au fond d'une piscine vide


... D'autres scènes, plus légères, visent à nous faire sourire dans une histoire tragique : lorsque Marceau fait ses improvisations pour amuser les enfants, lorsqu'il caricature les nazis pour apprendre aux plus jeunes à s'enfuir... On adore Jesse Eisenberg dans ce rôle touchant qui lui va comme un gant (bien qu'on se l'avoue : il ne sera jamais mime, tant parfois on ne comprend rien à ce qu'il fait) surtout lorsqu'il communique avec Bella Ramsey (que l'on avait déjà repéré dans Game of Thrones) qui joue de sa mine triste avec une facilité déconcertante. Mais l'ensemble du casting est également convaincant avec Félix Moati dont c'est le premier rôle anglophone et Matthias Schweighöfer qui est glaçant en Klaus Barbie. Lorsqu'on termine le film en lisant les nombres d'enfants décimés, il est difficile de ne pas avoir la boule au ventre, et les lumières se sont ainsi rallumées sur trois salves d'applaudissements (pour l'hommage, les acteurs et le film), souvent le mouchoir écrasé entre les deux paumes.

Aude_L
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Les meilleurs films de 2020 et Deauville 2020

Créée

le 19 sept. 2020

Critique lue 2.1K fois

3 j'aime

Aude_L

Écrit par

Critique lue 2.1K fois

3

D'autres avis sur Resistance

Resistance
freddyK
5

Et Sans un Mot Dire Non

Resistance du jeune réalisateur vénézuélien Jonathan Jakubowicz convoque la grande et la petite histoire à travers la jeunesse de Marcel Mangel qui deviendra par la suite le mime Marcel Marceau à la...

le 27 nov. 2020

7 j'aime

Resistance
Nils_Merique
9

La grosse claque de 2020

Les grands films sur la seconde guerre mondiale se sont fait très rares ces dernières années, la période étant reléguée à des films factuels historiques ennuyeux et peu incarnés.Je ne m'attendais...

le 6 juin 2020

7 j'aime

1

Resistance
Beng29
7

Un biopic de faits historiques à voir

Ce biopic sur Marcel Marceau raconte au plus juste une partie de son existence. Avant même le début de la guerre on le voit rêvant de devenir acteur et de faire rire, puis vient la guerre où il...

le 28 nov. 2020

4 j'aime

Du même critique

The French Dispatch
Aude_L
7

Un tapis rouge démentiel

Un Wes Anderson qui reste égal à l'inventivité folle, au casting hallucinatoire et à l'esthétique (comme toujours) brillante de son auteur, mais qui, on l'avoue, restera certainement mineur dans sa...

le 29 juil. 2021

49 j'aime

Mulholland Drive
Aude_L
5

Tout le monde adore...sauf moi (snif).

Certes, David Lynch a un style bien à lui et reconnaissable entre mille, mais il faut l'aimer, si l'on veut s'extasier devant Mullholland Drive. Subjectivement, on n'y a rien compris, si ce n'est...

le 9 oct. 2021

41 j'aime

Dogman
Aude_L
8

Besson a lâché les chiens !

Caleb Landry Jones est vraiment stupéfiant, nous ayant tour à tour fait peur, pitié, pleurer (l'interprétation d’Édith Piaf en clair-obscur, transcendée, avec un montage si passionné, on ne pouvait...

le 18 sept. 2023

40 j'aime