" All the little devils are proud of hell "
Le désert, la poussière, le ciel bleu à perte de vue, des rails, deux petites baraques et une construction de planches bringuebalantes faisant office de gare : bienvenue dans le fin fond de la cambrousse australienne. John Grant est professeur dans une petite école d’une seule et unique classe (baraque n°1) dans la charmante ville de Tiboonda. C’est le dernier jour avant les vacances de noël, la chaleur paralyse les rares habitants de la ville. John vide sa chambre, rend ses clés, s’enfile une petite bière au bar du Motel (baraque 2) et prend le train destination Bundayabba -Yabba pour les intimes- où un avion vers Sydney et sa dulcinée l’attendent.
Une fois à Yabba, il fait face à la bienveillance agressive et envahissante des habitants locaux puis s’immerge peu à peu dans la vie locale : chaleur moite et étouffante, bière, wisky et jeux. Il se retrouve entrainé et piégé par la force du groupe avec lequel il traine et n’arrivera jamais à en ressortir. Il plonge alors petit à petit dans la violence ordinaire et banale qui jaillit du quotidien profondément ennuyeux des habitants locaux.
La décente en enfer de ce cher John est mise en scène à la perfection. L’ambiance poisseuse et oppressante s’accentue à mesure que les minutes passent et qu’il tisse des liens avec les habitants locaux. La pression suit la même courbe ascendante et l’on est de plus en plus scotché à l’écran et enfoncé dans son siège. La réalisation sobre offre des plans léchés puis laisse place à quelques séquences survitaminées au montage ultra rapide quand la pression est à son apogée. Jouissif.
Les acteurs sont eux aussi parfaits, à commencer par Gary Bond en professeur dépassé par les événements et qui sombre peu à peu dans la folie. Les différents personnages qu’il rencontre à Yabba sont aussi génialement interprétés : l’officier de police, permière rencontre de John et porte d’entrée vers l’univers malsain de Yabba, les deux brutes un peu simplet et surtout le Docteur, seul personne saine de la populace locale au premier abord, il s’avère en être le spécimen le plus dérangé (bien qu’il soit le seul à avoir conscience de la folie qui y règne). Les seconds rôles sont également criant de justesse.
Quand le générique de fin fait son apparition, il faut quelque secondes pour réagir et sortir de sa torpeur, tout hébété que l’on est suite à la claque que l’on vient de se manger dans la tronche. Le cauchemar de John, la scène ahurissante de la chasse au Kangourou et la bobine démente du docteur nous poursuivent ensuite pendant quelques jours.