Ce film de genre fait figure d’anomalie dans le paysage cinématographique français très frileux à l’idée de produire du cinéma bis. Pourtant il y a une quinzaine d’années il y a avait eu une vague qui s’était lancée dans le cinéma d’horreur ou gore. Avec plus (« Frontières », « Martyrs », « Ils »…) ou moins de réussite artistique (« Mutants », « La Meute », …) mais jamais de grand succès public, les auteurs des œuvres préférant donc s’expatrier à Hollywood plus prompt à utiliser leurs talents. Et l’année dernière arriva « Grave » de Julia Ducornau avec son sujet cannibale et jusqu’au-boutiste qui bouscula la donne du cinéma d’auteur français. Avec « Revenge » c’est encore une femme qui tient la caméra d’un projet hors des sentiers battus mais terriblement excitant sur le papier dont la promesse artistique est tenue de bout en bout. Cela, on ne pourra pas le reprocher à ce film de série B. Et il tombe à pic dans un contexte de féminisme exacerbé et de mouvements sur les droits des femmes.
On notera surtout que la cinéaste a su imposer sa marque visuelle avec son long-métrage visuellement réussi de bout en bout. C’est formellement ultra-stylisé et ça colle parfaitement au sujet. Il y a des idées de mise en scène à chaque plan, c’est assez souvent novateur et très agréable à regarder. De ses cadrages à la manière dont elle optimise ses magnifiques décors - sans pour autant se regarder filmer, car le contenant épouse toujours le contenu ici - c’est un sans faute. En revanche, elle a tendance à trop étirer ses plans et la longueur de certaines séquences apparaît inutile. Si « Revenge » ne procure jamais l’ennui et s’avère rythmé, il aurait tout de même pu être raccourci d’un bon quart d’heure ce qui aurait dynamisé encore plus cette petite bobine pêchue mais parfois trop contemplative. Niveau gore, on est également plus que rassasiés. Les jets de sang et les plans longs et peu ragoûtants sur des plaies et de la chair éventrée ne manquent pas. Mais si l’on ne goûte pas à ce type d’excès on pourrait trop cela gratuit ou excessif.
Mais le problème majeur c’est l’absence de logique entre la tonalité sérieuse adoptée par le film et ses quelques invraisemblances, dont l’une handicape sérieusement sa crédibilité. En effet, la résurrection de l’héroïne après la blessure qu’on lui a infligée relève du total fantasme. Donc soit tout le film partait dans le second degré, la folie ou l’improbable à la « Kill Bill », soit le scénario aurait du être moins généreux dans ses plaies. Car ce décalage nuit à notre perception du récit. Il faut donc se résoudre à gober à cette résurrection et se forcer à l’appréhender comme possible ou rester sur l’analogie entre cette lotita vengeresse et un phénix qui renaît de ses cendres (référence d’ailleurs bien appuyée ici). Ensuite, le scénario tient sur un timbre poste se résumant à la vengeance simple et directe d’une femme sur ses bourreaux. Mais on n’est pas venu pour ça donc on ne peut pas vraiment prendre cela comme un défaut. Louons en tout cas un projet abouti et assumé de A à Z sans tomber dans le ridicule de certaines productions Z justement et restant dans le B avec panache et flamboyance.
Plus de critiques sur ma page Facebook Ciné Ma Passion.