La mère célibataire de Rien à perdre, qui vit seule avec ses deux enfants, n'est pas parfaite, loin de là, mais n'a t-elle pas raison de se révolter quand, après un accident domestique, son plus jeune garçon lui est retiré ? C'est l'enjeu principal du premier long-métrage de fiction de Delphine Deloget, dont le documentaire était jusqu'alors la spécialité. Cette expérience explique d'ailleurs pourquoi le film, aussi dramatique soit-il, se garde bien d'être manichéen, même s'il se situe clairement du côté de la mère, face à une machine administrative le plus souvent lourde et inhumaine. Mais c'est l'histoire d'un engrenage, aussi, de ceux qui peuvent provoquer des dégâts humains qu'un peu de compréhension aurait pu suffire à éviter. Le terme de "mère courage" ressemble à un cliché mais il correspond assez au portrait que nous propose le film, dans son inépuisable quête pour récupérer son enfant (dé)placé. Attention, Rien à perdre n'a aucun aspect misérabiliste, atténuant son réalisme très pertinent de quelques touches légères d'humour et d'absurde. Dans ce registre social, Delphine Deloget réussit en tous cas à imposer un ton très personnel qui n'est pas du tout un copier/coller de l'univers de Loach ou des Dardenne. Évidemment, pour achever de nous convaincre, elle a sous la main un stradivarius en la personne de Virginie Efira. L'actrice nous bluffe une fois de plus dans un rôle qui ressemble peu à ce qu'elle a joué auparavant mais où elle est crédible, et émouvante cela va de soi, de bout en bout du métrage.