On lit le titre, le casting, le pitch et déjà on se dit que c’est un énième western du très grand bien qu’un peu ennuyant John Ford, que ce sera sans doute charmant et joli mais aussi très cliché et sans doute pas très à l’avantage des indiens.
Et bien si vous dites cela vous faites erreur, car de 1; John Ford n’est pas ennuyant, que de 2, ces films ne sont pas des clichés mais bien le témoin d’une certaine Amérique ou plutôt d’une certaine pensée de l’Amérique et que de 3; en un film Ford dit plus de choses que certains cinéastes en cinquante.
Rio Grande donc, film qui s’intègre parfaitement à une trilogie sur la cavalerie composée des excellents titres que sont Le massacre de Fort Apache et La charge héroïque, trilogie qui revient forcement sur les racines de l’Amérique. Ford déploie une fois de plus sa pensée, comment la communauté résiste aux « intempéries » et surtout comment elle s’en relève. Ici un couple et quelques recrues sont la base de cette communauté, face à des indiens hostiles le couple en question déjà séparés par une précédente guerre (elle n’a pas pardonnés à Wayne un acte qu’il fut obligés d’accomplir) se verra rapprochés, et les recrues seront en mesure de faire leurs preuves comment si l’adversité était le ciment du groupe. Et à travers ces protagonistes Ford pose une autre question, pourquoi au sortir de la guerre de sécession, les USA repartent pour un nouveau conflit, les guerres indiennes ? Y a-t-il dans cette volonté une part de l’identité américaine ? Ça y ressemble, une chose est sur comme le dit la sublime Maureen O‘Hara (c’est elle qui forme le couple avec John Wayne) « ce qui fait de lui un bon soldat. Je le déteste. ». L’obéissance et le dévouement sont à double tranchant mais attention il ne faut pas y voir une critique de l’armée mais bien critique des politiques qui sont les dépositaires du pouvoir. Un général le dira explicitement «Je ne suis pas fier de ce que je vous ai fait faire, mais c’était la guerre ». L’armée premier fondement d’une Amérique encore toute jeune, symbole d’un idéal qui ne sera jamais atteint mais qui subsiste et c’est peut être là l’essentiel.
En fait voir un film de Ford c’est capté un fragment d’Amérique, quand en plus cela se déroule dans les splendides courbes de Monument Valley, on ne peut qu’admirer l’expression du maitre.