Jacques Doillon filme les amours tumultueuses de Rodin, dans la chair et sur la matière. Hélas, Vincent Lindon ne parvient pas à sauver du naufrage ce biopic frustrant et terriblement ennuyeux.
Rodin se concentre sur les quelques années de vie du sculpteur qui ont vu naître son controversé Monument à Balzac et s'éteindre ses amours tumultueuses avec Camille Claudel. Izia Higelin, peu convaincante en élève et amante rebelle, donne mécaniquement la réplique à un Vincent Lindon rugueux qui s'entoure d'une farandole de modèles dénudées. Pénalisés par une mise en scène et une direction d'acteurs trop académiques, le couple ne dégage aucune alchimie, et même celui qui avait gagné le Prix d'interprétation pour La loi du marché peine à déployer l'étendue de son talent, marmonnant tellement qu'il en devient parfois incompréhensible.
La confusion ne s'arrête pas à l'élocution des comédiens : sans repère temporels ni évolution physique, difficile de s'y retrouver dans les nombreuses idylles de Rodin, et ses rapports avec cette femme qu'il n'aura jamais quittée, même pour Camille. Ce biopic, désespérément classique dans sa succession de plans à la narration obscure, s'attache à une période trop courte pour réellement nous proposer un tableau satisfaisant de l'artiste, 100 ans après sa disparition.
Dans l'écrin de son atelier, merveilleusement reconstitué et éclairé, les gestes lents et mesurés du sculpteur hypnotisent son audience. Mais sans chaleur sous la pierre, sans émotion sous le masque du ruminant barbu, les quelques secondes de fascination se transforment en deux heures d'ennui profond.