Rush respecte toutes les lois incontournables du genre Rivalité. Deux personnalités aussi différentes qu'il est possible se côtoient, s'affrontent, se haïssent et finissent par se rapprocher dans un happy end final. Comme dans le catch il y a le playboy sympathique(Hunt) et le « méchant » ego-centré (Lauda). Ron Howard ne nous épargnera pas non plus l'absence de profondeur de champ (les deux héros sont seuls au milieu d'une foule de blaireaux). Niki Lauda et James Hunt sont en fait les deux faces opposées mais complémentaires du pilote de course qui habituellement cohabitent sous un même casque. Si je ne jurerai pas que Lauda était un Casanova des circuits, il y a fort à parier que James Hunt était au volant aussi concentré, aussi perfectionniste et aussi exigeant que « l'Ordinateur », surnom de Lauda, sinon il n'aurait jamais été champion du monde. Mais je comprends parfaitement cette élégance du beau garçon qui laisse fantasmer la gent féminine sur la désinvolture du surdoué, sur l'aisance du James Bond, alors que la Formule1 demande de la sueur, de l’entraînement, des connaissances techniques pointues et parfois des larmes.
Dans tout biopic il faut aussi introduire un brin de romance, et donc inventer des histoires déchirantes de couples fusionnels, et s'arranger avec la banale réalité. Ainsi la rencontre de Niki Lauda avec Marlène, la femme de sa vie (Alexandra Maria Lara) est-elle invraisemblable. Et Suzy, la jolie compagne de Hunt, le playboy fantasque, l'avait en fait plaqué pour jouer sa Cléopâtre avec Marc-Antoine (Richard Burton), ce qui est passé sous silence.
Mais j'oublierai tout ces détails pour les images sublimes des deux morceaux de bravoure : le terrible Grand-Prix d'Allemagne du Nürburgring de 1976, dont le déroulement était digne des plus grands scénaristes d'Hollywood, avec les prémonitions de Lauda et son accident effroyable dont il ressortira défiguré, restant pour l'Histoire de la F1 « celui qui a réussi à tromper la mort ».
Et ce dernier Grand Prix titanesque, au Japon sous une pluie battante, avec des voitures littéralement en immersion (Fittipaldi), qui voit James Hunt gagner d'un point le championnat du monde, non sans avoir été victime d'une crevaison et obligé de faire une remontada fantastique.
Mais le film n'est pas réservé aux fans de F1. Rush est filmé avec une très grande précision, l'atmosphère des 70s est bien évoquée et les acteurs Daniel Brühl (défiguré comme Helmut Zemo) et Chris Hemsworth (toujours aussi marteau) sont parfaits. Le film comblera les passionnés de course automobile comme les autres. Deux heures de pilotage sans faute pour Ron Howard.