Une course effrénée qui trébuche dans les derniers tours.
"Rush" est un film en demi-teinte. Bénéficiant d'une réalisation irréprochable. Les facilités scénaristiques, ainsi que le côté quelques fois "to-much" qu'emprunte le long-métrage rendent le contenu beaucoup trop superflus. Se basant sur des faits réels, Ron Howard maîtrise de main de maître son sujet, préférant alimenter son produit comme un drame psychologique dans un emballage assez sobre, plutôt que de faire appel à des effets stylisés et spectaculaires. Mais c'est dans le dernier tour que son "Rush" échoue tristement, nous offrant un final bien trop prévisible, recyclant avant cela des scènes sans grande inspiration, le contenu restant correcte, mais rendant une copie peu surprenante des différentes thématiques du genre. Outre ces quelques maladresses, le métrage aspire grâce à son sujet, et intéresse par son accoutumance à maintenir un rythme soutenu. Il traite de la meilleure façon qui soit, la dualité entre les deux coureurs. Car c'est évidemment cette confrontation, agrémentée par la complexité et les différences des personnages, qui va réussir à passionner le spectateur, et le clouer dans son siège pendant une grande partie du film. Lauda et Hunt aussi égocentriques et déterminés l'un que l'autre, vont se livrer un duel, je dirais même une véritable bataille en entretenant une relation, aussi bien sur les circuits, que en dehors, mêlant respect, admiration, méprise et intimidation. Une lutte effrénée qui valut à l'un de terribles cicatrices et à l'autre, d'échapper plus d'une fois à la mort. Le montage orchestre d'une manière parfaitement dosée les scènes de courses (parfaitement réussies, à défaut de réalisme) et les passages plus dramatiques avec une aisance particulièrement efficace, rendant le métrage aussi intense que poignant. Les deux acteurs sont évidemment extrêmement justes, offrants de grands moments de cinéma, Brühl tout en retenu, Hemsworth, en exprimant toute la brutalité de sa nature, jouant également de son charisme. Il est d'ailleurs remarquablement bien joué de la part des scénaristes, d'exploiter de manière presque schizophrénique la personnalité des deux antagonistes, nous troublant par la même occasion, en ne sachant quel parti prendre, que se soit pour l'un ou pour l'autre. C'est d'ailleurs, sur cet aspect que le film, à partir d'un moment, va s'essouffler, en ayant exploité au maximum l'épaisseur personnel des deux champions. L'abus sur le plan relationnel va finalement rendre le poids et l'impact de certaines scènes quelconques, le renouvellement à ce niveau étant totalement épuisé. Les scènes sonnent juste, mais elles se succèdent sans atteindre le niveau émotionnel espéré, beaucoup trop superficiel à mon goût. Il est évident que le fait de s'inspirer de faits réels, complique la tâche d'un point de vue de l'écriture. Maintenir un minimum de cohérence, tout en introduisant les ficelles du cinéma, Howard se doit de rester fidèle au matériau de base. Il ne peut changer que très peu d'éléments, de peur de froisser le fan de la première heure. Celui qui connait les faits relatés, ne sera en rien surpris, tandis que le parfait novice, intrigué, partagera un avis totalement différent. C'est en cela, que le projet d'adaptation est une épreuve difficile. Transcender le réel par le biais de la fiction, tout en jouant sur la corde de la fidélité et en contentant les uns par le travail de recherche fourni et une relecture plus spectaculaire, et les autres, en offrant un pur divertissement sur un fond plus théâtrale, rendant le sujet aussi attractif qu'intéressant. Pour conclure, "Rush" reste une oeuvre techniquement réussie, jouissant d'une réalisation impeccable, le rythme permettant de ne jamais décrocher, passionnant habilement son sujet avec une maîtrise totale de la psychologie, mais manquant cruellement d'originalité.