Rush
7.2
Rush

Film de Ron Howard (2013)

Superbe reconstitution du romantique d'années 70 flamboyantes vues par le prisme de la Formule 1, Rush est avant tout bâti sur l'adrénaline de la confrontation entre deux hommes, une rivalité qui les cannibalise, un miroir qui leur est tendu et qui renvoie, à chacun, le reflet de l'autre dans la glace.


La rage de vaincre qui coule dans leurs veines est identique. Pourtant, James Hunt et Niki Lauda sont aux antipodes l'un de l'autre, jusqu'au chemin que chacun emprunte pour réussir. A la germanique rigueur et à l'approche scientifique de la course répondent le romantisme anglais, la jouissance de l'instant et le talent paresseux. La même rage de vaincre les anime et les pousse à se surpasser l'un l'autre. A se sublimer lors de courses magnifiquement restituées, caméra embarquée à l'appui, permettant une totale immersion du spectateur dans un monde arpenté par les véritables pilotes : Regazzoni, Reutemann, Mario Andretti ou encore les acteurs des coulisses tels Lord Hesketh, Teddy Mayer ou encore Luca De Montezemolo. Moteurs vrombissants dans des face-à-faces sans merci, au ras du bitume, à la place d'un pilote funambule dans un cockpit qui tressaute et s'écrase sous la force exercée par la vitesse et le flou gagnant le champ de vision. Spectaculaire saisissant dans la reconstitution d'accrochages et d'accidents mythiques, dont celui de Lauda, effrayant de réalisme, rappelant le danger accepté par ces gladiateurs dans une discipline où, comme le dit le pilote autrichien en ouverture du film, en moyenne deux pilotes par an étaient emportés par leur passion.


Témoignage d'une époque sportive et d'un état d'esprit révolus dominés par des artisans parfois un peu fantasques, Rush s'impose sans mal parmi les meilleurs films de son réalisateur et au firmament des films dédiés au sport, tant les événements qu'il dépeint sont chevillés à un sentiment haletant et magique, même pour celui qui connaît la fin de l'histoire ou celui qui l'a vécue. Les acteurs participent brillamment à cette intensité, tant Daniel Brühl et Chris Hemsworth semblent nés pour jouer leur rôle respectif.


C'est aussi l'équilibre trouvé, syncopé, miraculeux, entre le spectaculaire de la course effrénée et l'intimité des relations des pilotes, qui séduit. Cet aspect, assez romancé, permet cependant le prolongement de la rivalité sur la piste, tant les modes de vie, la manière de jouir de celle-ci et l'affectif sont, eux aussi, diamétralement opposés. Hunt papillonne, se donne, prend et rejette aussitôt les objets de ses amours passagères. Lauda se contient, froid calculateur, touche le bonheur qu'il perçoit comme une faille dans sa carapace de pilote. Avant de mourir, de souffrir le martyr tout autant dans ses chairs brûlées au contact de son casque qu'il peine à enfiler, que dans son absence sur les circuits, impuissant à contrecarrer la remontée irrésistible de son challenger.


Mais les rivaux en tout se retrouvent sur l'asphalte, sous une pluie battante. Casqués et sanglés dans une même volonté d'en découdre, de s'imposer. Dans un ballet de livrées colorées bien connues des puristes. Et du mur d'eau les aveuglant , les deux combattants surgissent une dernière fois, dans une rivalité acharnée qui se transforme, peu à peu, en respect.


Lauda s'incline : il a déjà à peu près tout connu et est revenu d'entre les morts. Hunt brave les éléments et le risque en martyrisant sa mécanique, au bout du suspens et de ses limites alors que tout semble perdu.


Ces deux géants là ne regretteront rien. Hunt a prouvé qu'il pouvait le faire et jouira de son succès, comme une prémonition que ce titre se révèlera à jamais fils unique. Lauda, lui, remettra l'ouvrage sur le métier, toujours aussi discipliné et méthodique. Rush se résumerait presque dans cette dernière conversation, au terme de deux heures d'un spectacle à la fois intime et surexcitant.


Behind_the_Mask, tête brûlée.

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le 29 juin 2015

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Behind_the_Mask

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