Je me souviens très bien quand ce film est sorti, 1 an après, il sortait en VHS, je l'avais vu chez un copain qui en était littéralement fou ; avant notre séance dans son salon, il l'avait déjà vu une vingtaine de fois en m'expliquant que c'est un film totalement insolite qui marque et qu'on a envie de le revoir plusieurs fois. Sur le moment, je n'avais pas été tellement convaincu, car ma relation avec le cinéma de Lynch a été au fil des années houleuse, mais dans le cas présent, même si je n'abonde pas totalement dans le sens de mon pote, je crois que c'est un film qui fascine.
Insolite, oui le mot est faible, surtout en 1990 où on n'était pas encore très habitué à ce type de délire. Lynch signe un mélange de road movie, de thriller, de drame psychologique et de comédie qui se révèle tour à tour haletant, terrifiant et onirique, c'est surtout une love story aux accents trash et chaotiques, ponctuée de scènes cauchemardesques et d'images choc, comme ces craquements d'allumettes en très gros plan avec son amplifié. Lynch offre un patchwork visuel en multipliant les changements de ton et les personnages qui constituent une palette d'énergumènes singuliers ou complètement barges, comme ce Bobby Peru incarné par un Willem Dafoe pervers, cette Perdita Durango incarnée par une Isabella Rossellini ensorcelante, ou encore l'excellent Harry Dean Stanton en détective malchanceux.
Le tout est rythmé par les notes d'Angelo Badalamenti et la chanson de Chris Isaak, "the Wicked Game", mais on a aussi beaucoup d'attache au couple sensuel et parfois torride formé par une éblouissante et sexy Laura Dern et Nicolas Cage avec sa veste en peau de serpent qu'il a piquée à Marlon Brando. Le final avec "Love me tender" réellement chanté par Cage est mémorable. Avec Sailor & Lula, David Lynch livrait peut-être son film le plus lisible et le plus facile à décrypter, alors qu'il donnait déjà libre cours à son goût du bizarre.